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Le comte Lanza vous salue bien
9 août 2016

L'AFRIQUE DU SUD ET LES TRADITIONS IMPORTEES PREMIERE PARTIE

 

 

 

L'AFRIQUE DU SUD ET LES TRADITIONS IMPORTEES

PREMIERE PARTIE

 

 

 

 

 

 

DISCUSSION DEVANT LES BACS D'UN LIBRAIRE

 

 

 

 

 

 

 

Le point de départ de ce message est une conversation entendue devant les bacs  de livres d'occasions en devanture d'un grand libraire parisien qui a la bonne idée de vendre au moins autant de livres d'occasion que de livres neufs.

Deux clients, qui peut-être ne se connaissaient pas, échangaient des propos :

"On aurait mieux fait de leur donner leur indépendance tout de suite" disait l'un.

"Vous savez qui a envoyé l'armée là-bas" disait l'autre .

Visiblement, ce "leur" et ce "là-bas" désignaient les Algériens et l'Algérie. Je ne sais pas si nos deux discuteurs étaient d'accord ou si comme souvent, leur désaccord naissait de la discussion, pour le seul plaisir de contredire. Quant à savoir qui avait envoyé l'armée, je suppose qu'il fallait comprendre que c'était un gouvernement dit de gauche, dont l'un des membres devait plus tard devenir président de la république... En fait l'armée avait lutté contre la rébellion dès le début de celle-ci en 1954 mais il est exact que le président du conseil Guy Mollet avait décidé en 1956 d'envoyer "le contingent" c'est-à-dire les soldats faisant leur service militaire, en plus des miltaires de carrière.

On sait que le résultat n'a pas correspondu aux espérances; par contre l'envoi des soldats "appelés" en Algérie a contribué à rendre très impopulaire dans l'opinion française la politique de maintien de l'Algérie sous contrôle français, que tout le monde appela vite "la guerre d'Algérie".  

A peu près à la même époque, avec seulement des militaires de carrière, la Grande-Bretagne mit en échec la rébellion des Mau-Mau au Kenya et celle des Chinois pro-communistes en Malaisie. La Malaisie accéda à l'indépendance dès 1957 - mais la Malaisie à qui les Britanniques reconnurent l'indépendance n'avait rien à voir avec la rébellion pro-communiste : d'abord la population majoritaire était composée de Malais, qui n'avaient pas de sympathie excessive pour la minorité chinoise dans laquelle les rebelles se recrutaient, et ensuite elle était anti-communiste. La fédération de Malaisie, qui existait déjà sous protectorat britannique avant 1957, composée de plusieurs états dirigés par des sultans ou rajahs, luttait  du côté des Britanniques contre la rebellion. Celle-ci, sans véritable appui dans la population, fut vaincue.  Au moment de l'indépendance, la rébellion était déjà très affaiblie et devait disparaître peu après.

Quant au Kenya, les Britanniques avaient bien essayé d'impliquer le leader nationaliste pro-indépendantiste Jomo Kenyatta comme ayant partie liée avec la rébellion des Mau-Mau. Ils le mirent en prison, puis ils le sortirent de prison et en firent leur interlocuteur pour l'accession du Kenya à l'autonomie et ensuite à l'indépendance.

Jomo Kenyatta déclara que le Kenya ne serait pas gouverné par des hooligans et que Mau-Mau était une expression dont il ne voulait plus jamais entendre parler. Le Kenya devint indépendant en 1964 mais à cette date, les Mau-Mau avaient été battus et éliminés depuis plusieurs années. Leur violence avait réussi à dresser contre eux aussi bien l'ethnie majoritaire que les ethnies minoritaires; les Mau-Mau ne furent pas reconnus comme des précurseurs honorables par le nouveau gouvernement indépendant, mais considérés comme des contre-exemples.

Le Kenya ou la Malaisie ne ressemblaient pas vraiment à l'Algérie française car la population d'origine européenne y était faible (encore qu'il existait au Kenya une caste de moyens et de grands propriétaires blancs qui redoutaient l'ndépendance et dont certains menaient ou avaient mené autrefois une vie de patachons - voir l'article wikipedia sur le "groupe de la Vallée heureuse" https://en.wikipedia.org/wiki/Happy_Valley_set). Les héritiers du plus emblématique des grands propriétaires blancs, Lord Delamere, vivent toujours au Kenya et continuent parfois à défrayer la chronique.

On se souviendra que c'est au Kenya que se situe le livre célèbre de Karen Blixen, Out of Africa. Le mari de l'héroïne, le baron Blixen, a aquis une "ferme" (en fait une très grande propriété) que sa femme finit par gérer seule, régnant un peu comme une châtelaine médiévale bienveillante,  sur des centaines sinon des milliers d'indigènes kikuyus.

En Malaisie, l'indépendance ne produisit aucune coupure dans l'activité des grandes sociétés étrangères (britanniques   ou américaines) exploitant la caoutchouc ou d'autres ressources.

 

jomo-kenyatta

Jomo Kenyatta, son chasse-mouche à son poignet, prête serment comme Premier ministre du Kenya, juin 1963, environné par les officiels Britanniques en casque colonial ou en bicorne à plumes.

http://www.newsweek.com/kenya-elections-kenya-president-uhuru-kenyatta-raila-odinga-647526

 

 

Mes discuteurs devant la librairie n'avaient pas envisagé une possibilité d'histoire alternative : que l'Algérie devienne indépendante avec un gouvernement européen qui avec le temps céderait la place à la majorité indigène (plus ou moins de bon gré).

Ils avaient bien raison; cette possibilité ne correspondait pas à ce qu'on pourrait appeler "l'outillage mental" des Français. Les Français d'Algérie n'imaginaient pas vivre sans la "mère patrie" ni la mère patrie ne concevait de les laisser créer un pays indépendant. ll fallait que l'Algérie soit française ou bien algérienne et arabe, il n'y avait pas d'autre possibilité.

Peut-être vers la fin, certains activistes de l'Algérie française, se sentant abandonnés par la France, eurent-ils l'idée d'une Algérie indépendante mais toujours gouvernée par les Européens - avec ou sans les Algériens - mais ce n'était qu'une vue de l'esprit sans aucune possibilité de réalisation.

 

Quant la France se résolut à accorder l'indépendance, on laissa entendre que les Français et Européens d'Algérie (on les appelait les Pieds-Noirs pour d'obscures raisons) pourraient rester en Algérie et devenir citoyens du nouvel état, s'ils le souhaitaient. C'était une amère plaisanterie et les Pieds-Noirs refluèrent vers la métropole. Après le cessez-le-feu, la violence, déjà omniprésente depuis huit ans, ne cessa pas : jusqu'aux premiers jours après l'indépendance, il y eut des  des assassinats, des massacres et des enlèvements pour obliger les  Européens  à partir. La population européenne comprit qu'elle n'avait de choix qu'entre la valise ou le cercueil. Quant aux Algériens qui avaient soutenu les Franças, tout le monde connait leur calvaire.

En raison de l'héritage idéologique français, la France (aussi bien celle des hommes politiques de métropole et de l'opinion métropolitaine que celle des Pieds-Noirs) s'était coupée de toute autre possibilité. Dans la longue durée, la manière dont la France avait gouverné  ses possessions et sa conception  du patriotisme selon laquelle des Français ne pouvaient pas cesser de faire allégeance à la France pour fonder leur propre pays, excluaient toute évolution vers une indépendance dirigée par la population européenne, au contraire de ce qui se produisit dans de nombreux territoires britanniques. 

 

La voie qui fut celle de l'Afrique du Sud fut donc, même pas fermée, mais purement inimaginable pour l'Afrique du Nord..

 

 

 

 

 UNE EVOLUTION SANS REVOLUTION ?

 

 

 

 

Généralement, la date d'indépendance d'un pays est connue.

Mais l’Afrique du Sud, comme les autres Dominions britanniques, passa insensiblement d'une autonomie étendue à l'indépendance.

Les Dominions de la Couronne (Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, Irlande, Terre-Neuve - plus tard intégré dans le Canada -  et Afrique du Sud) furent clairement considérés comme des Etats indépendants à partir de la Conférence de Westminster en  1931, qui confirmait d'ailleurs des décisions précédentes (déclaration Balfour lors de la Conférence impériale de 1926, elle-même rendant officiel "un état de fait pré-existant, puisque les dominions avaient, en pratique, déjà acquis leur indépendance", selon l'article Wikipedia Dominion).

Même si on continuait à parler d'Empire, celui-ci était désormais composé, outre les colonies et protectorats,  de pays indépendants à égalité avec la Grande-Bretagne dans un British Commonwealth of Nations.

Mais rien de particulier ne marqua cette évolution  et c'est à peine si les habitants en eurent conscience. Les Dominions continuèrent  de reconnaître comme souverain  le souverain britannique (avec des réticences de plus en plus fortes pour l'Irlande - appellée Etat libre d'Irlande depuis les accords de 1922). Mais les Dominions développèrent davantage leur politique étrangère. En 1939, ils prirent librement, par vote de leur parlement,  la décision d'entrer en guerre contre l'Allemagne (sauf l'Irlande qui resta neutre). En Afrique du Sud, une partie de l'opinion - chez les Afrikaners -  s'opposa à la guerre (ce fut aussi le cas au Canada chez les Québecois, peu enclins à aller mourir pour l'Empire).

Indépendante officiellement depuis 1931, et en pratique depuis une date antérieure malaisée à déterminer,  l’Afrique du Sud resta comme avant gouvernée par les Blancs

De ce point de vue, rien ne changea non plus lorsqu’elle rompit avec la couronne britannique en 1961 pour devenir une république.

Il y avait, et il y a toujours, en Afrique du Sud deux population blanches distinctes, les Britanniques et les Boers ou Afrikaners, descendants des colons néerlandais : ces derniers avaient disposé de républiques indépendantes, certaines éphémères, d’autres plus durables. Les républiques boers, vaincues définitivement en 1902 par les Britanniques, disparurent, mais moins de 10 ans après, les dirigeants boers étaient de nouveau au pouvoir, d’abord dans les colonies britanniques qui avaient remplacé les anciennes républiques, puis partageaient le pouvoir avec les Britanniques dans la nouvelle Union sud-africaine autonome  mise en place en 1910, le premier Premier ministre de l’Union étant un ancien général boer.

L’acquisition d’une autonomie s’achevant en indépendance complète par rapport à la Grande-Bretagne (et symboliquement concrétisée par la fin de l’allégeance au souverain britannique, même considéré comme roi ou reine de l’Afrique du Sud) fut donc une préoccupation des Blancs et surtout des Afrikaners.

Pour les populations noires et les autres populations non –blanches, les Coloured (métis) et les Asiatiques, la vraie rupture fut en 1994 avec l’adoption d’un régime complétement démocratique, même si les Coloured avaient déjà obtenu des droits similaires aux Blancs quelques années avant et si l’apartheid avait été démantelé à partir de 1991, sous l’action des mouvements représentant la majorité noire et grâce à l’intelligence de gouvernants blancs qui comprirent qu’il fallait partager le pouvoir ou disparaître.

Pourtant le changement ne prit pas la forme d’un changement radical de société.

Dans l’Afrique du Sud actuelle, vous pouvez, quelle que soit la couleur de votre peau – surtout si vous avez les moyens – pratiquer le golf, le cricket ou même la chasse à courre, parader en kilt au son des cornemuses dans des régiments de réserve de tradition écossaise ou irlandaise, faire enregistrer votre blason au bureau héraldique du gouvernement, envoyer vos enfants dans des écoles de style britannique, avec élèves en cravate et blazer, professeurs en toge, hymne et cri de guerre de l’école, et souvent participation obligatoire au "service" religieux, catholique ou anglican.

Les Blancs occupent toujours  (en général) les rangs supérieurs de la société,  malgré des conditions de vie rendues pénibles par la menace d’une délinquance galopante,  qu’il s’agisse des Britanniques ou des Afrikaners (anciens Boers), comme on pourra le voir dans cette étude.

 

 

 

 

 

 

QUELQUES NOTIONS HISTORIQUES

 

 

 Du point de vue européen, l'histoire de l'Afrique du Sud débute réellement avec l'arrivée de quelques dizaines de Néerlandais sur le Dromedaris, et deux autres navires, commandés par Jan Van Riebeeck, en 1652. Ils fondent la ville du Cap ainsi nommée car elle contrôle le Cap de Bonne Espérance, emprunté par les navigateurs occidentaux depuis la fin du 15ème siècle.

Au départ il s'agit seulement de créer une escale pour les bateaux de la compagnie des Indes orientales en route vers les comptoirs néerlandais d'Asie. Puis le comptoir prend de l'expansion et plusieurs familles se consacrent à l'agriculture; l'établissement devient une colonie. Des Protestants français chassés par l'abrogation de l'édit de Nantes par Louis XIV s'y installent.

Les occupants indigènes (ethnie Khoïkhoï) sont assez clairsemés  (et les relations entre eux et les nouveaux arrivants parfois violentes) ; la colonie fait venir une main d'oeuvre servile de Madagascar ou même des îles néerlandaises d'Asie et d'autres territoires mais a assez peu de rapports avec les puissantes populations indigènes d'Afrique du sud (les Bantous) qui vivent très éloignés du Cap. Mais le territoire de la colonie en s'étendant, arrive au contact des tribus bantoues (que les Européens appellent Cafres) vers 1770 et les premiers combats ont lieu.

 

 

 

Charles_Bell_-_Jan_van_Riebeeck_se_aankoms_aan_die_Kaap

Débarqument de Jan Van Riebeeck dans la baie de la Table, future ville du Cap, en 1652. Tableau du 19ème sècle de Charles Davison Bell.

Le drapeau tricolore aux trois bandes horizontales est celui des Provinces-unies, comme on dit à l'époque, devenues ensuite les Pays-Bas.

Wikipedia

 

 

Des colons néerlandais, qui parlent déjà un dialecte propre, l'Afrikaans, plus que le néerlandais standard, et qu'on appelle déjà des Boers, cherchent à s'établir plus au nord pour échapper aux règlementations des gouverneurs coloniaux et se créer une existence indépendante, même au risque des contacts dangereux avec les Bantous.

 

A la fin du 18ème siècle, la colonie du Cap passe sous le contrôle des Britanniques à l'occasion des guerres européennes qui opposent la république française et ses alliés plus ou moins forcés  (dont la république batave, nouveau nom des Pays-Bas) à la Grande-Bretagne et ses alliés.

 

En 1806 la Grande-Bretagne occupe de nouveau le territoire du Cap qui restera entre ses mains à la paix de 1814.

 

Dans les années 1830, des centaines de familles de fermiers Boers qui refusent la dominaton britannique et les premières lois (modestes) d'égalité raciale introduites par les Anglais, quittent la colonie du Cap pour fonder des territoires indépendants plus au nord. Cette émigration prend le nom de Grand Trek (Grote Trek en néerladais, grande émigration). Dans leurs chariots bâchés tirés par des boeufs, les Boers partent à la recherche de la terre promise dans un esprit quasi religieux.

Dans la colonie du Cap, les descendants des colons hollandais qui n'émigrent pas demeurent majoritaires par rapport aux Britanniques.

 

Parallèlement, l'intérieur de l'Afrique australe a été bouleversé par ce qu'on appelle le Mfecane (l'écrasement, le broyage) : ce phénomène par lequel des ethnies sont obligés de fuir et provoquent à leur tour des migrations ou des conflits avec les ethnies rencontrées en chemin, est principalement causé par l'ascension d'un chef Zoulou, Chaka. Ce dernier forme une puissance locale qui domine ou écrase les populations voisines.

 

Les Zoulous sont au départ une tribu assez modeste issue d'une branche des Bantous, dont Chaka, qui devient leur chef vers 1818, fait un peuple puissant en obligeant les vaincus à s'assimiler

" L'armée de Chaka à son apogée comptera plus de 100 000 hommes, auxquels il faut ajouter environ 500 000 hommes des tribus voisines" (Wikipedia). Il fait régner une discipline de fer : chaque manquement est puni de mort.

 "Selon certains historiens, les conquêtes zoulous et leurs conséquences seraient responsables directement ou indirectement de la mort de plus de deux millions de personnes qui laisseront d'immenses territoires vides de toute population" (Wikipeda).

 

Chaka est assassiné en 1828 par des membres de sa famille; son peuple ne supportait plus sa tyrannie. Lors de la mort de sa mère il avait fait sacrifier 7000 personnes comme manifestation de deuil et instauré des interdits (sur la cohabitation des couples mariés ou la consommation de lait) durant un an.

Une fois Chaka disparu, ses successeurs maintiennent la puissance du peuple zoulou.

 

 

 

L'ESPRIT BOER

 

 

Les Zoulous vont se heurter aux Boers qui ont entrepris le Grand Trek.

En 1838, un des chef d'une colonne d'émigrants boers, Retief, pense signer un accord avec le chef des Zoulous. Mais lors du banquet qui doit sceller l'accord, Retief et ses compagnons sont massacrés et les Zoulous massacrent aussi les émigrants restés dans leurs campements en plusieurs endroits (massacre de Weenen).

Cet épisode crée un fossé entre les Boers et les Zoulous.

En 1838 les Boers et les Zoulous ont une confrontation qui tourne à l'hécatombe pour les Zoulous ; protégés derrière leurs chariots, les Boers n'ont presque pas de victimes alors que 10 000 Zoulous sont tués.Pour les Boers qui ont invoqué Dieu avant la bataille, Dieu s'est prononcé en leur faveur (bataille de la Blood River).

Les Boers fondent alors la république de Natalia (la région avait été nommée Natal - Noël, par les Portugais, ses premiers explorateurs).

Mais les Britanniques l'annexent sous le nom de Natal, obligeant les Boers à passer les rivières Orange et Vaal pour fonder leur nouveau territoire libre.

Ils fondent les républiques du Transvaal et d'Orange. Ces républiques agricoles incarnent l'esprit boer : foi protestante rigide, sentiment de supériorité raciale et méfiance envers les Noirs, vie simple et austère. Les Boers ne reconnaissent aucun droit aux Noirs, simples travailleurs à leur service, parfois traités comme des esclaves..

Pendant ce temps sur les frontières de la colonie du Cap, les Britanniques se heurtent aux peuples qu'ils appellent Cafres, dont les Xhosas. Après les avoir battus au cours de diverses guerres, ils constituent la Cafrerie britannique.

Les Xhosas, vaincus par les Anglais, donnent foi à une prophétie annoncée par une jeune fille en 1856 selon laquelle s'ils abattent tout leur bétail, les guerriers morts ressusciteront et les Xhosas seront vainqueurs des Britanniques.Cet épisode aboutit à une dramatique famine qui anéantit envoron 50 000 Xhosas. Leur territoire passe de 105 000 à 27 000 habitants en deux ans. La Cafrerie est peu après incorporée dans la colonie du Cap. Des colons d'origine allemande s'y installent.

 

 

 

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 Le massacre de Weenen : les Voortrekkers boers sont massacrés par les Zoulous le 17 février 1838

Tableau de Charles Davison Bell.

Wikipedia

 

 

 

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 Reconstitution de la bataille d'Isandlwana, défaite désastreuse des Britanniques le 22 janvier 1879, où une colonne de 1700 hommes (mlitaires britanniques et troupes indigènes) appartenant à l'armée de Lord Chelmsford, fut presque entièrement anéantie par 20 000 Zoulous.

 http://www.inthefootsteps.com/battlefield-tours/pre-20th-century/anglo-zulu-war.html

 

 

 

 

 

 PREMIERE ET DEUXIEME GUERRE DES BOERS

 

 

 

 Vers 1875, en simplifiant,  trois pouvoirs existent en Afrique du Sud : au Sud, les britanniques qui remontent vers le nord à partir de la colonie du Cap et ont soumis les populations noires vivant sur le territoire de la province du Cap et du Natal, à l'est de la colonie du Cap; au nord, les républiques boers et le pouvoir zoulou. Ces pouvoirs vont se heurter.

 En 1879 les Britanniques subissent un désastre face aux Zoulous mais se réorganisent et reçoivent des renforts : à la fin de l'année le pouvoir du chef unique des Zoulous est défait et le peuple zoulou fractionné en tribus contrôlables. Le Zululand britannique est créé.

En 1877 les Britanniques annexent sans combat le Transvaal, jusque là république boer, mais en 1880-1881, une insurrection des Boers (première guerre des Boers) contraint les Britanniques à se contenter d'un protectorat qui est lui-même abandonné peu après, rendant leur pleine indépendance aux républiques boers.

Entretemps, un nouveau facteur est intervenu, la découverte d'or et de diamants dans une zone conteste entre les Boers et les Britanniques, puis en territoire boer même.

Des petits états éphémères (le Griqualand, le Stellaland), situés en zone minière ou même créés par des prospecteurs, sont par la suite annexés par les Britanniques.

Les Boers, qui ont réussi à repousser les attaques zouloues et à se débarrasser dans un premier temps des Britanniques, ne peuvent rien contre l'arrivée sur leur territoire de milliers de prospecteurs. Ces étrangers (uitlanders en afrikaan) privés de droits par les Boers (puisque justement ce sont des étrangers) réclament leur participation aux décisions politiques des républiques boers. La Grande-Bretagne soutient leurs revendications.

Des incidents font monter la tension. Il est clair que les Britanniques envisagent d'une façon ou d'une autre d'inclure les républiques boers dans leur sphère d'influence, d'autant plus que la colonie du Cap, dotée maintenant d'une forme d'autonomie, a comme Premier ministre Cecil Rhodes, convaincu de la vocation impériale de la race anglo-saxonne (concept qu'il affectionne). Rhodes développe une forme de colonialisme dans l'intérêt de la colonie du Cap autant que celui de la mère-patrie. Il s'entend bien avec les descendants les colons hollandais de la colonie du Cap, qui forment la majorité de la population blanche de celle-ci et ont les même droits que les Britanniques.

Dans cette colonie, les Noirs ont le droit de vote sous réserve de payer, comme les Blancs, un cens électoral -ce qui fait qu'ils sont probablement peu nombreux à disposer des droits civiques. Dans les républiques boers, les Noirs n'ont aucun droit civique.

Rhodes est aussi le fondateur  de la compagnie diamantifère De Beers et de la Compagnie britannique de l'Afrique du Sud, qui se donne pour but de coloniser les territoires encore libres au nord (en 1896 les miliciens de la Compagnie défont le roi des Matabele Lobengula et fondent ce qu'on appellera la Rhodésie - aujourd'hui Zimbabwe et Zambie).

 

En 1895, la tension est accrue par un raid raté des partisans de Rhodes sur le Transvaal (raid Jameson).

 

 

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 Cecil John Rhodes. Partisan convaincu de l'impérialisme et croyant au destin de la "race anglo-saxonne", homme d'affaires et Premier ministre de la colonie du Cap, il dut abandonner ses fonctions après l'échec du raid Jameson, tout en conservant une grande autorité morale dans les affaires de l'Afrique du Sud. Il mourut prématurément en 1902, peu avant la fin officielle de la guerre des Boers, après avoir vu la défaite des républiques boers. Il admirait l'esprit des Boers et estimait qu'ils avaient toute leur place en Afrique du Sud. En mourant il dit : Si peu fait, tant à faire.

 " Après des funérailles nationales au Cap où son corps est exposé dans l'enceinte du parlement, sa dépouille est transportée par train jusqu'en Rhodésie du Sud via des arrêts marqués à Kimberley et Mafeking. Il est enterré le 10 avril 1902 près de Bulawayo sur les Monts Matopo, après la lecture d'un poème spécialement écrit en son honneur par Rudyard Kipling et salué par des centaines de guerriers Ndébélés qu'il avait combattus quelques années auparavant" (Wikipedia)

 

 

 

 

 

En 1899, le nouveau Haut-Commissaire britannique pour l'Afrique du Sud, Sir Alfred Milner, engage l'épreuve avec les républiques boers sur le droit de vote des uitlanders. Son but est de formuler des revendications inacceptables pour obliger les Boers à déclarer la guerre, en mettant le gouvernement britannique, plus prudent, devant le fait accompli. C'est ce qui arrive : le Transvaal (dont le nom officiel est Zuid-Afrikaansche Republiek) déclare la guerre, suivi par l'Etat libre d'Orange.

Les Britanniques sont d'abord surpris et subissent des défaites; les Boers entrent en territoire britannique dans la colonie du Cap et au Natal en octobre-novembre 1899 (siège de Ladysmith, de Mafeking, de Kimberley), puis en décembre, infligent aux Britanniques les défaites de la Semaine noire (notamment à Colenso) .

 

 

 

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 La délivrance de Ladysmith, 28 février 1900, peinture de John Frederick Bacon

 

Les renforts britanniques arrivent et permettent de délivrer les villes assiégées. Puis les Britanniques font face avec toute leur puissance (un demi-million de soldats et des chefs prestigieux, le vieux Lord Roberts et le plus jeune Kitchener, le récent vainqueur des Derviches à Omdurman au Soudan). Ils s'emparent des grandes villes des républiques boer au milieu de l'année 1900. Les Boers mènent alors une difficile guerre de guerilla.

Le vieux président du Transvaal Kruger fait une tournée en Europe pour obtenir des soutiens. Il est accueilli avec enthousiasme aux Pays-Bas et dans les pays qui ont de l'antipathie pour l'Angleterre comme la France et l'Allemagne. La cause des "petits" Boers qui font face au géant britannique est populaire - et bien entendu, à l'époque, il ne vient à l'esprit de personne de critiquer le racisme des Boers, qui est partagé par tous les pays européens. Mais rien de concret ne résulte de cette visite. 

Les républiques boers, à bout de forces,  sont contraintes de capituler en 1902. Les généraux Smuts et Botha menèrent les négociations.

Pendant cette guerre, la population majoritaire d'origine hollandaise de la colonie du Cap restait neutre, même si des actes de rebellion pro-boer eurent lieu au Cap et au Natal.

La guerre causa beaucoup de victimes civiles, notamment en raison des conditions de vie dans les camps dits de concentration où les Britanniques avaient interné les familles des combattants boers afin d'empêcher ces derniers de se ravitailler.

 

 

 

 NAISSANCE DE L'AFRIQUE DU SUD

 

 

 En signant la paix, les Britanniques avaient promis aux Boers de garantir tous leurs droits, sauf l'indépendance.  L'ancien général boer Louis Botha convainc le gouvernement britannique de faire un important effort financier en faveur des anciennes républiques vaincues. Le Transvaal et l'Orange obtiennent le droit d'avoir un gouvernement autonome avec un  parlement élu. Les anciens leaders de la guerre des Boers devinrent les dirigeants de ces colonies. En 1907 Botha devient Premier ministre du Transvaal.

 

Pour les habitants blancs ou pour la puissance domnante (la Grande-Bretagne) les problèmes de l'Afrique du Sud de l'époque étaient dus à l'existence sur son sol de deux communautés blanches adverses. Pourtant la majorité de la population était noire; mais cette population essentiellement rurale ne posait pas vraiment de problème - sinon de maintien de l'ordre (une insurrection localisée fut réprimée en 1906).

 

Quelques années après la guerre on commença à parler d'une fédération, qui regrouperait la colonie du Cap, l'Orange, le Transvaal et le Natal.

Pour la première fois, des membres de la population noire et des métis, encouragés par quelques Blancs, essayèrent de peser sur les décisions  en cours: " Sous la conduite de Wiliam Philip Schreiner, ancien premier ministre de la colonie du Cap, les représentants des Bantous et des Métis, vinrent à Londres [en 1909] pour exposer leurs doléances mais sans succès.  " (Wikipedia)

En 1910 les négociations aboutirent à la formation de l'Union d'Afrique du Sud, dotée d'une large autonomie. Le souverain britannique était représenté par un gouverneur-général et le Premier ministre désigné par le parlement de l'Union.

L'Union est formée de quatre régions dotées de compétences autonomes - c'est donc une fédération :

- l'ancienne colonie du Cap qui prend le nom de province du Cap;

- la province du Transvaal;

- l'ancienne Colonie de la Rivière Orange qui reprend son nom d'Etat libre d'Orange;

- La province du Natal.

La capitale administrative (siège du gouvernement) était fixée à Prétoria (également capitale du Transvaal) mais le Parlement siègeait  au Cap et la Haute Cour de Justice à Bloemfontein. Johannesburgh était la capitale économique, siège de la Bourse.

Le premier Premier ministre fut le général Louis Botha. Il illustrait la reprise du pouvoir par les Boers, même s'il fut particulièrement loyal à l'Empire britannique.

La guerre  de 1914-18, à laquelle l'Union participa avec le reste de l'Empire, suscita une opposition de la part de certains Boers (ou Afrikaners) qui avaient plus de sympathie pour les Allemands, opposition allant parfois jusqu'à la rébellion.

 Mais globalement les anciens Boers et plus largement les Afrikaners,  furent fidèles à l'Empire, à l'image de Botha, Premier ministre pendant la durée de la guerre (il meurt en 1919) et de Jan Smuts, ancien général boer qui commanda les troupes de l'Union engagées contre les Allemands et fut membre du cabinet de guerre impérial du Premier ministre britannique Lloyd George. .

 Smuts était un esprit très éduqué (il avait fait ses études à Cambridge) et n'était pas un Boer mais un Afrikaner du Cap. D'abord séduit par les idées de Cecil Rhodes, il avait rompu avec les Britanniques et rejoint les républiques boers après le raid de Jameson. Ministre du président du Transvaal Kruger, chef militaire pendant la gerre des Boers, il fut après la fin de la guerre, avec Botha, l'un des artisans de la reconstruction des territoires boers et de la coopération avec les Britanniques, assumant simultanément plusieurs postes de ministre dans le gouvernement de l'Union.

 

 

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Les Union Buildings, siège du gouvernement de l'Afrique du Sud à Pretoria, avec la statue du général Botha.

Wikipedia.

 

 

 

 

En 1912, certains Noirs éduqués formèrent une association pour obtenir l'égalité des droits c'était le South African Native National Congress (SANNC, Congrès national indigène sud-africain), qui devait devenir l'ANC (African national Congress). Ses membres cherchaient à obtenir l'égalité dans le cadre des règles du droit britannique, et ne remettaient pas en cause ni l'appartenance  l'Empire ni la présence des Blancs. Ils estimaient que la présence des Blancs vait apporté des aspects positifs comme le christianisme, l'éducation et l'état de droit; mais ils  réclamaient aussi le respect des cultures traditionnelles africaines : les chefs des tribus et rois coutumiers étaient membres de droit du Congrès.

" Le mouvement adopte immédiatement le chant Nkosi Sikelel' iAfrika ("Dieu bénisse l'Afrique") comme hymne pour l'ouverture et le fermeture de ses congrès." (Wikipedia)

Dans ses premiers temps, le SANNC, puis l'ANC, sont les organes des quelques éléments de la bourgeoisie noire.

D'autres populations ethniques existaient en Afrique du Sud : les Indiens, appelés comme main d'oeuvre par les Britanniques, étaient devenus assez nombeux et réclamaient l'égalité des droits avec les Blancs. Le jeune avocat Gandhi fit ses débuts en Afrique du Sud en défendant, sans beaucoup de succès, ses compatriotes avant de retourner aux Indes pour devenir le grand homme qu'on connaît.

Il y avait aussi l'importante population des métis, non seulement issus d'unions entre Blancs et Noirs, mais aussi de mélanges avec les Indonésiens (Malais du Cap), les Indiens, les Malgaches, les Mozambicains, les Mauriciens et d'autres. Plusieurs de ces groupes parlaient (et parlent toujours) l'afrikaans. Ces populations recevront l'appelation de coloured, qui en Afrique du Sud désigne les populations ni noires, ni blanches.

Le point commun des métis est d'être généralement méprisés par les Blancs et exclus des droits reconnus à ceux-ci.

De façon générale, la doctrine qui prévalait était celle du Colour Bar : " Le colour bar (la « barrière de couleur » en français) est un terme qui évoque une pratique empirique de discrimination raciale utilisée dans les anciennes colonies britanniques en Afrique (Kenya, Rhodésie, Union sud-africaine, etc.) et en Asie (Inde, Singapour, etc.)." (définition Wikipedia)

 

 

 

 

 

ENTRE DEUX GUERRES ET LA SECONDE GUERRE MONDIALE

 

 

 

 

 A la conférence de la paix de 1919, l'Afrique du Sud est représentée par Smuts.

Une délégation noire est aussi reçue avec sympathie par le Premier ministre britannique Lloyd George , mais il ne peut que les renvoyer vers le gouvernement sud-africain pour leurs revendications.

L'indépendance de l'Afrique du Sud dans le cadre du Commonwealth est reconnue comme aux autres dominions (Canada, Australie, Nouvelle-Zélande...) par la conférence de Westminster en 1931, le souverain britannique restant chef de l'Etat.

Au début des années 20, la vie politique en  Afrique du Sud est agitée. Smuts, devenu Premier ministre, dont le parti sud-africain associe des Britanniques et des Afrikaners, réprime violemment des émeutes ouvrières qualifiées de communistes et perd les élections de1924. Le parti national afrikaner de Hertzog, lui aussi ancien général boer, qui a rompu avec Smuts en raison de sa politique rop alignée sur la Grande-Bretagne, arrive alors au pouvoir et prend des décisions pour renforcer l'identité afrikaner, comme le remplacement du néerlandais par l'afrikaans comme langue co-officielle avec l'anglais, l'adoption d'un nouveau drapeau ou d'un nouvel hymne en rupture avec les symboles impériaux britanniques. Il adopte une politique sociale favorable aux Blancs pauvres.

Quant aux Noirs, qui sont la majorité de la population, ils sont pénalisés par des lois restrictives sur l'emploi et la propriété et n'ont le droit de vote, dans la colonie du Cap et au Natal, que sous des condition de ressources, certes imposées à tous les électeurs, mais encore plus difficiles à remplir pour eux.  Une réforme les obligera par la suite à voter dans un collège spécial, pour des députés spécifiques nécessairement Blancs

Certains dirigeants de l'ANC, comme Josiah Gumede, déçus par le peu d'attention des gouvernements blancs,  passent une alliance avec le syndicat des travailleurs de couleur (ICU, Industrial and commercial workers union), alors puissant, se rapprochent du parti communiste sud-africain et adoptent certains aspects du marxisme. Mais ils se heurtent à la majorité du parti, réformiste et respectueuse du cadre légal .La ligne pacifique de l'ANC est réaffirmée au congrès de 1930, mais ces turbulences internes font perdre au parti beaucoup de son influence sur la population noire.

A la convention panafricaine de 1935 de Bloemfontein (ouverte par le maire blanc de la ville), les dirgeants de l'ANC "proclament leur loyauté au Royaume Uni et à l'Afrique du Sud et en appellent au parlement britannique pour intervenir dans les affaires intérieures sud-africaines et améliorer le sort des communautés de couleurs" (Wikipedia). Une délégation de la convention est reçue par le Premier ministre Hertzog, sans succès.

La part de plus en plus importante des Noirs qui habitent en zone urbaine inquiète les gouvernements blancs.

En 1934,  les partis de Smuts et Hertzog (parti national et parti sud-africain) fusionnent, et l'opposition aux Britanniques s'estompe chez beaucoup d'Afrikaners - mais une minorité d'entre eux se reconnait dans les idées de Daniel Malan (pasteur et docteur en théologie, qui a été ministre de Hertzog) qui refuse l'appartenance à l'Empire britannique, souhaite l'instauration de la république (revendication du parti national abandonnée par Hertzog dès le début des années 20) et surtout commence à développer la théorie de l'apartheid. Ces minoritaires du parti national forment le parti national purifié.

Pour Malan, l'apartheid est la seule façon de sauvegarder la suprématie blanche et l'identité afrikaner ou Afrikanerdom.        .

Celle-ci est défendue par une société secrète très active, l'Afrikaner Broederbond (Fraternité afrikaner) et par l'Eglise réformée hollandaise, très influente dans l'enseignement, qui développe une vision théologique du rôle du peuple afrikaner.

Les années trente voient l'affirmation de l'identité afrikaner, qui culmine dans la célébration du centenaire du Grand Trek.

 On assiste à un " déferlement sans précédent du nationalisme afrikaner à travers tout le pays" (Wilkipedia) culminant avec la pose à Pretoria de la première pierre des fondations du Voortrekker Monument, (monument aux pionniers boers) en décembre 1938

En 1939, Smuts et le Premier ministre Hertzog sont en désaccord sur la question de savoir si l'Afrique du Sud doit entrer en guerre. Hertzog, partisan de la neutralité,  veut organiser de nouvelles élections sur le sujet. Il n'est pas suivi et le Parlement vote la déclaration de guerre contre l'Allemagne nazie,  entrainant la démission de Hertzog. Smuts devient Premier ministre et sous son autorité, l'Afrique du Sud participe activement à l'effort de guerre.

Toutefois  une partie de l'opinion (les partisans d'Hertzog, qui meurt en1943, et le parti national de Daniel Malan) désapprouvent la participation au conflit. Les partisans de Hertzog rejoignent le parti de Malan qui prend le nom de parti national réunifié et élabore un programme chrétien-national axé sur l'identité afrikaner.

Seuls des volontaires servent dans l'armée sud-africaine; les Noirs n'ont pas droit d'être combattants et servent comme auxiliaires. 

Smuts fait partie du cabinet de guerre impérial de Churchill. Il est nommé field marshall de l'armée britannique. Les troupes sud-africaines participent aux combats en Somalie et Ethiopie, puis en Europe

En 1945 Smuts est un des signataires de la Charte des Nations-Unies et rédige son Préambule. Bien que prudent en matière raciale, il souhaite engager l'Afrique du Sud vers une plus grande égalité dans ce domaine, conformément à la Charte des Nations-Unies. Il commandite un rapport qui propose, de façon progressive l'abandon des mesures de ségrégation. Au contraire le parti national du Dr Malan propose de renforcer les mesures de ségrégation.

 En 1948, de façon surprenante pour Smuts, il est désavoué aux élections qui portent au pouvoir le parti national réunifié de Daniel Malan et un parti allié; les gagnants sont minoritaires en voix mais majoritaires en sièges grâce au découpage électoral favorisant les zones rurales ou ouvrières blanches.

Smuts meurt en 1950, honoré par tout l'Empire britannique.

 Pendant la guerre, l'oganisation de jeunesse de l'ANC a pris de l'importance et se démarque de l'organisation principale, toujours modérée, par des positions plus revendicatives. L'un de ses dirigeants est un certain Nelson Mandela.

 

 

 

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  Inauguration du Vortrekker Monument en 1949, en présence du général Smuts (à gauche), ancien Premier ministre, du Dr Malan, nouveau Premier ministre et d'une foule de 150 000 personnes. Les femmes dans l'assisance, et les épouses des deux Premiers ministres, ont mis pour l'occasion les robes et les coiffes emblématiques des femmes Boers du 19ème siècle.

Le Vortrekker Monument est un mémorial consacré aux Boers qui entreprirent le Grand Trek et sont considérés, au moins par les Afrikaners, comme les fondateurs de l'Afrique du Sud. Cet immense monument contient une crypte avec un cénotaphe en mémoire des Boers qui ont construit le pays, avec l'inscription en afrikaans, Ons vir Jou, Suid-Afrika, Nous pour toi, Afrique du Sud. La crypte est ornée des drapeaux des anciennes républiques boers. Tous les ans le 16 décembre, le soleil éclaire l'inscription - pour le jour anniversaire de la bataille de Blood River gagnée en 1838 par les Boers contre les Zoulous.

https://bourkewhite.wordpress.com/galleries/afrikaners/voortrekker-monument/

 

 

L'APARTHEID

 

 

L'arrivée au pouvoir de Daniel Malan (appelé souvent Dr Malan, car docteur en théologie), qui devient Premier ministre (à 74 ans) va permettre d'instaurer une ségrégation raciale plus forte que celle existant déjà.

Il est rappelé que dans la province du Cap, les Noirs et Coloured ont le droit de vote - mais pour les Noirs, depis les années trente, ils doivent voter, dans un collège séparé, pour 3 députés blancs chargés de les représenter.  Dans les autres provinces de l'Union sud-africaine, les Noirs sont représentés au Sénat par un sénateur blanc.

 D'autres règles existent : obligation de se munir d'un laisser-passer pour certains déplacements, exclusion de certaines professions, restriction au droit de propriété (impossible en dehors des "réserves" noires)  ou de résidence.

Le gouvernement Smuts considérait que ces restrictions pourraient être progressivement levées. Avec le gouvernement Malan, elles vont être renforcées avec la mise en place de l'apartheid.

" L'apartheid est cependant présentée comme un arsenal juridique destiné à assurer la survie du peuple afrikaner mais aussi comme un « instrument de justice et d’égalité qui doit permettre à chacun des peuples qui constitue la société sud-africaine d’accomplir son destin et de s’épanouir en tant que nation distincte " (Wikipedia)

 

 Au début des années 1950, la population blanche représente 3 millions de personnes soit 21,4 % de la population totale, les Noirs sont 8 millions. La population urbaine noire (1,5 millions de personnes) devient égale à la population urbaine blanche. 

Malan semble avoir eu surtout le souci du peuple afrikaner et particulièrement des pauvres Blancs. Mais il est certain qu' il croyait à la supériorité de la race blanche. Pasteur de l'église protestante, auteur d'un mémoire de maîtrise sur Kant et d'une thèse sur l'idéalisme de Berkeley, ce n'était pas un esprit borné et fondamentaliste : " Il croit en la théorie de l'évolution de Charles Darwin et distingue dans la Bible ce qui relève du symbolisme et de la véracité historique" (Wikipedia, article D. F. Malan). Sa conviction profonde était que les nations ont été créées par Dieu, chacune dans un but particulier, et que la nation afrikaner devait réaliser son destin.

En arrivant au pouvoir, il déclare : « Aujourd'hui l'Afrique du Sud nous appartient une fois de plus... Que Dieu nous accorde qu'elle soit toujours nôtre. »

 

 Les premières mesures prises sont l’interdiction des mariages interraciaux  (1949) et  l’interdiction des relations sexuelles interraciales (Immorality Act,1950).

En 1950, la Population Registration Act (loi d'enregistrement de la population ) crée quatre catégories raciales dans lesquelles la population est répartie :

- les Blancs;

- les Noirs;

- les Asiatiques;

- les métis ou Coloured.

 

 En 1950 aussi fut votée la Group Areas Act (loi sur les zones d'habitation ) qui obligeait  les différentes populations  à résider dans des zones d'habitation définies. Les centres-villes et les quartiers les plus développés étaient généralement interdits aux Noirs, Métis et Asiatiques (Wikipedia).

En 1953  la Reservation of Separate Amenities Act (Loi sur les commodités publiques distinctes) organisait la ségrégation dans l'espace public.

La Bantu Education Act de 1953 prévoyait l'existence d'établissements d'enseignement séparés selon les races y compris l'université.

La Bantu Authorities Act de 1951 prévoyait de créer des zones pour les populations noires selon leur ethnie d'origine.

D'autres lois instituaient un laisser-passer pour les populations noires dans certains cas, interdisaient le travail de ces populations en dehors de certaines zones, interdisaient le parti communiste.

Le droit de vote des Coloured dans la Province du Cap et au Natal est modifié en 1951 : ils seront inscrits sur des listes séparées et éliront 4 députés blancs. Cette loi est attaquée par l'opposition et par une organisation d'anciens combattants blancs; au centre d'un débat constitutionnel,  elle doit attndre plusieurs années pour entrer en application.

 

 Ces mesures n'étaient pas dictées par Malan qui se contentait de donner des orientations générales. Elles se mirent en place avec le second ministre des affaires indigènes de son gouvernement, Hendrik Verwoerd,  véritable père de l'apartheid.

Les premières mesures n'ont soulevé que peu ou pas  du tout de protestations dans les  partis (blancs) d'opposition au parti national ou dans l'opinion publique blanche.

Puis celle-ci, quand elle désapprouvait la politique du parti national,  s'est focalisée sur la question du vote des coloured bien plus qu'au sort des Noirs dans un premier temps.

Même au sein du parti national de Malan et au gouvernement, il existait des voix discordantes sur la question des coloured, ainsi Havenga, ministre des finances.

 Finalement l'apartheid allait surtout être connu à l'étranger pour ce qu'on a appelé l'apartheid mesquin (petty apartheid) : bus différents pour les Blancs et pour les non-Blancs, entrées séparées des bâtiments publics, bancs réservés aux Blancs, plages interdites ou réservées aux non-Blancs (généralement moins attrayantes !).

La défense de résider dans certains quartiers allait engendrer la création de townships, sorte de bidonvilles (bien que les logements aient parfois été décents) d'où les Noirs sortaient pour aller travailler dans les zones blanches, munis des autorisations de déplacement et de travail sans lesquelles ils pouvaient être arrêtés. Car bien que Malan ait eu comme principe que les Noirs ne devaient pas constituer un réservoir de main d'oeuvre pour les Blancs, c'est bien ce qui se passait.

 

Mais l'intention profonde de Verwoerd était de regrouper les Noirs dans certaines régions  par la politique des bantoustans et de prétendre qu'ainsi, ils avaient un pays qui leur était propre, autonome par rapport à l'Afrique du Sud. Soit les Noirs y vivaient en permanence, soit ils venaient travailler en Afrique du Sud mais comme des travailleur immigrés qui ne pouvaient à ce titre prétendre aux droits de citoyenneté.

Bien que prévus dès 1951 par la Bantu Authorities Act, les bantoustans (mot formé avec le suffixe persan stan, qui signife pays - donc pays des Bantous) devaient vraiment se mettre en place dans les années 1960. Malan était d'ailleurs sceptique sur cette politique.

En 1951, le parti national purifié de Malan fusionne avec le parti afrikaner de Havenga, son allié, pour donner naissance au parti national qui gagne de nouveau les élections de 1953, toujours sans être majoritaire en voix.

Malan acquiert une stature internationale. Il se rend au couronnement de la reine Elizabeth, ce que lui reprochent les plus antibritanniques de son parti, et  se rend en visite en Israël. Il rencontre Ben Gourion et jette les bases de bonnes relations futures.

En 1954, Malan, fatigué et âgé de 80 ans, démissionne. Il espère être remplacé comme Premier ministre par le modéré Havenga, mais le parti choisit le conservateur Strijdom, soutenu par Verwoerd, dans une ambience de méfiance et d'hostilité entre les protagonistes.

Malan meurt en 1959.

 

 

 

 

 

 LA FIN DE LA MONARCHIE

 

 

 

L'Union Sud-Africaine, Etat indépendant, avait toujours comme souverain le monarque britannique, représenté par un gouverneur-général; le pays appartenait au Commonwealth.

En 1947, le roi George VI avec sa famille avait visité les possessions britanniques en Afrique sous statut de colonie eu de protectorat et  bien entendu l'Afrique du Sud. Il avait ouvert la session du Parlement au Cap.

 C'est d'alleurs durant cette visite, le jour de son 21 unième anniversaire, que la future reine Elizabeth II prononça sa célèbre allocution pour les peuples du Commonwealth dans laquelle elle déclarait qu'elle leur consacrerait sa vie, fut-elle longue ou brève.

 

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George VI, sa femme et ses filles avec le Premier ministre d'Afrique du Sud, le général Smuts, lors de la visite royale en 1947, devant la montagne de la Table, dominant la ville du Cap. Le général Smuts filma la famille royale avec sa caméra, qui intéresse visiblement  le roi.

La future reine Elizabeth est à gauche sur la photo.

https://www.reddit.com/r/HistoryPorn/comments/3ekf3d/princess_elizabeth_general_jan_smuts_king_george/?st=ishkr3ir&sh=d225f5f1

 

 

 

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 La princesse Elizabeth, future reine, fêta son 21ème anniversaire durant sa visite en Afrique du Sud en 1947. On la voit ici lors de la soirée donnée pour son anniversaire, dansant avec Sir Pieter De Villiers Graaff, futur député et chef du parti uni, dans l'opposition (modérée) au gouvernement d'apartheid.

https://fr.pinterest.com/pin/89157267602803371/

 

 

 

 

 

Le programme politique de Daniel Malan, Premier ministre à compter de 1948, comportait l'établissement de la république, alors que Smuts était clairement un monarchiste. Toutefois Malan mit cet aspect de son programme en veilleuse car il était de nature à créer des divisions inopportunes dans la population blanche. Le gouvernement Malan se borna à obtenir un changement dans la formulation qui désignait le souverain britannique et quelques mesures symboliques.

Contrairement aux autres Dominions où l'effigie du monarque britannique apparaissait sur les timbres de valeur courante, l'Afrique du Sud faisait parcimonieusement appel au portrait du souverain sur ses timbres-poste. La seule occasion après la guerre 1939-45 de voir le portrait de souverains britanniques fut la visite royale de 1947, puis en 1953 les timbres émis pour le couronnement de la reine Elizabeth II.

Par contre les timbres fiscaux comportaient le portrait du souverain britannique.

 

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  Timbres émis en 1953 par l'Union sud-africaine pour le couronnement d'Elizabeth II. Inscriptions en anglais et afrikaans.

http://www.stamps-for-sale.com/south-africa-queen-elizabeth-ii-1953-coronation-fine-used-block-of-4-53193-p.asp

 

 

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 Timbre fiscal à l'effigie d'Elizabeth II utilsé en Afrique du Sud avnt l'abolition de la monarchie. Inscriptions bilingues.

Enchères Delcampe.

 

 

La question de la monarchie allait bientôt être posée mais ce fut après le départ et même la mort en 1959 de Daniel Malan.

En 1958, le successeur de Malan, Strijdom, était mort subitement. L'artisan de l'apartheid, Hendrik Verwoerd, lui succèda comme Premier ministre.

En 1960 le Premier ministre britannique, Harold MacMillan, fit une tournée dans les pays africains. A cette occasion, il prononça un discours, une première fois au Ghana, déjà indépendant depuis 1957, puis en Afrique du Sud, où il utilisa l'expression du vent du changement : 

 The wind of change is blowing through this continent. Whether we like it or not, this growth of national consciousness is a political fact.

Le vent du changement souffle sur ce continent. Que ça nous plaise ou non, l'essor de la conscience nationale est un fait.

 

Pour les pays encore sous statut colonial, l'expression "conscience nationale" voulait dire aspiration à l'indépendance. Mais pour l'Afrique du Sud, elle signifiait l'aspiration de la majorité de la population à un régime fondé sur la règle démocratique, donc la reconnaissance des droits politiques à la majorité non-Blanche du pays.

 

 Lorsque MacMillan prononça ces paroles le 3 février 1960 devant le parlement de Pretoria, celui-ci ne s'y trompa pas et le discours fut accueilli avec une grande froideur, d'autant plus que MacMillan ajouta que certaines pratiques politiques de l'Afrique du Sud ne pouvaient pas être acceptées par ses partenaires - parlant, sans les mentionner clairement, des lois d'apartheid.

Certes, la Grande-Bretagne n'avait plus de responsabilité sur l'Afrique du Sud. Mais le lien avec la monarchie britannique agaçait le nationalisme des afrikaners et pouvait donner lieu à des formes de pressions morales sur la politique d'apartheid.

Sur ce intervint le massacre de Sharpeville (voir plus loin) qui accentua la désapprobation des autres pays à l'encontre de l'Afrique du Sud.

Le parti au pouvoir estima que le moment était venu de réaliser son programme en ce qui concernait l'abolition de la monarchie et l'instauration de la république.

 Le 5 octobre 1960, un referendum fut organisé avec la question : Etes-vous en faveur d'une république pour l'Union ?

Le "oui" obtint 52,3% des voix. Les Afrikaners avaient voté oui en majorité, les anglophones non en majorité, mais ils étaient moins nombreux. Le Natal avait voté à plus de 70% non.

Evidemment seuls les Blancs avaient pris part au vote. Le gouvernement avait de plus, inclus dans le corps électoral pour l'occasion les Blancs du Sud-Ouest africain, qui étaient  représentés au parlement sud-africain (le Sud-Ouest africain, ancienne colonie allemande,était  administré par l'Afrique du Sud depuis le début des années 1920 - il est aujourd'hui indépendant sous le nom de Namibie).

Le Premier ministre Verwoerd espérait pouvoir maintenir le pays dans le Commonwealth. Mais il décida de se retirer devant les critiques des autres pays du Commonwealth, avant d'être contraint au départ. Ces critiques agacèrent même l'opposition libérale qui fit bloc contre cette ingérence.

Le 31 mai 1961, jour de l'anniversaire de la signature du traité de Vereeniging marquant la fin de la guerre des Boers, et aussi jour de la fondation de l'Union (1910), la république d'Afrique du Sud (RSA) fut proclamée et son premier président investi. Le dernier gouverneur-général, représentant la reine, Charles Robberts Swart, fut désigné comme premier président de la nouvelle république.

 

 

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 Le 31 mai 1961, le dernier gouverneur-général de l'Union sud-africaine, Charles Robberts Swart, est investi des fonctions de président de la république d'Afrique du Sud dans la Groote Kerk (Grande église) de Pretoria.

La photo montre la voiture présidentielle arrivant sous la pluie au Kerkplein (Place de l'Eglise) où le nouveau président va procéder à la proclamation officielle de la république.

Blog de Andrew Cusack http://www.andrewcusack.com/2009/a-sad-day-in-pretoria/

 

 

 

 

 

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Commentaires
Le comte Lanza vous salue bien
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