Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le comte Lanza vous salue bien
31 octobre 2015

QUELQUES IMAGES DE LA RESTAURATION ANGLAISE DEUXIEME PARTIE

 

 

QUELQUES IMAGES DE LA RESTAURATION ANGLAISE

DEUXIEME PARTIE

 

 

 

 

FIN DE REGNE

 

 

 

Lely-studio-Charles-II-full-length-MN738-THUMB

Charles II en tenue de l'Ordre de la Jarretière

atelier de Sir Peter Lely

Philip Mould and cy.

 http://philipmould.com/

 

 

 Les relations de Charles II avec le Parlement se détèriorèrent.

 En 1672, Charles II publia la Déclaration royale d'indulgence, par laquelle il suspendait les poursuites pénales contre ls Catholiques et les Protestants dissidents.

Le Parlement s'y opposa et Charles dut retirer son texte et approuver le Test Act, une résolution du Parlement obligeant tout ministre et tout fonctionnaire à faire allégeance à la confession anglicane. 

Le ministre Clifford, converti au catholicisme, démissionna plutôt que de prêter serment, puis finit par se suicider.

Charles s'était rapproché de la France et avait déclaré la guerre à la Hollande. En 1674 le Parlement refusa les fonds pour continuer la guerre, obligeant le roi à faire la paix.

 Le nouvel homme fort du gouvernement était Thomas Osborne, qui allait recevoir le titre de comte de Danby. En le nommant, Charles lui avait dit : N'oubliez jamais que vous n'avez que deux amis : vous-même et votre mérite.

En 1678 une frénésie anti-catholique s'empara de l'opinion après la divulgation d'un soi-disant "complot papiste" pour assasiner le roi, dénoncé  par Titus Oates, ancien jésuite devenu protestant forcené et affabulateur

 Pour se concilier l'opinion protestante, Charles avait approuvé le mariage de Mary, fille de son frère James, duc d'York, avec Guillaume d'Orange, stathouder des Provinces-Unies ou Pays-Bas (c'est-à-dire chef héréditaire des forces armées, dans un pays qui, bien qu'ayant le statut de république, avait aussi une part de gouvernement héréditaire).

 La Chambre des Communes mit en accusation Danby pour haute trahison en raison de la politique royale favorable à la France (alors que Danby état bien moins pro-français que ce que prétendaient ses accusateurs).

Pour sauver Danby, Charles dissolut le Parlement en 1679. Mais le nouveau Parlement fut encore plus hostile au roi et à son ministre principal et prétendit que la dissolution du Parlement ne mettait pas fin à la procédure contre Danby.

Le roi fit alors un acte de "pardon" en faveur de Danby, ce qui tendait à reconnaître que tout ce qui était reproché à Danby était répréhensible mais avait été fait selon la volonté royale. Le Parlement maintint sa procédure d'accusation et Charles ordonna l'arrestation de Danby. Avec lui, des Lords catholiques furent emprisonnés à la Tour de Londres.

  A la chambre des Communes, sous l'influence du leader whig Lord Shaftesbury, une loi d'Exclusion fut proposée pour interdire à un catholique de prétendre à la succession royale, visant le rère du roi, James dont on connaissait la conversion au catholicisme. Charles n'ayant pas d'enfant légitime, son frère était premier dans l'ordre de succession.

 Certains Whigs étaient partisans d'attribuer le droit de succession au au duc de Monmouth, fils illégitime du roi.

 C'est à ce moment qu'apparurent les mots de Tory et de Whig.

Les adversaires de la loi d'Exclusion furent nommés Tories  (terme jusque là donné à des bandits catholiques irlandais) tandis que ses partisans furent surnommés Whigs (terme qui s'appliquait aux rebelles écossais de religion presbytérienne) et formaient the country party (le parti patriote en quelque sorte, la cause du protestantisme se confondant pour eux avec celle du pays).

Evidemment ces sobriquets ne devaient pas être pris au pied de la lettre, les Whigs et les Tories étaient en général tous des Anglicans ( de toutes façons les catholiques  étaient très minoritaires dans le pays et ne pouvaient appartenir au Parlement );  les dissidents protestants étant forcément Whigs, alors que tous les Whigs n'étaient pas, loin de là, favorables aux dissidents.

On a vu que le duc de Buckingham s'était fait une réputation d'opposant célèbre au pouvoir royal et au gouvernement en devenant le champion des dissidents.

  Charles procéda à une seconde dissolution du Parlement en été 1679 et il dut dissoudre de nouveau le Parlement élu qui n'était pas plus favorable à sa politique, puis le Parlement qui lui succéda après quelques jours de session, soit quatre dissolutions en un peu plus d'un an.

Le frère du roi et son successeur désigné, fut nommé haut commissaire en Ecosse pour l'éloigner de Londres et laisser retomber l'agitation dirigée contre lui.

Mais Charles put compter sur un sursaut de loyalisme chez le peuple et gouverna sans Parlement jusqu'à sa mort, obligeant son principal opposant, Lord Shaftesbury, à s'exiler après une accusation (inaboutie) de haute trahison en 1681.

 

En 1680, dans un geste amical envers les dissidents,  Charles concéda à William Penn, le dirigeant de la secte pacifiste des Quakers, un territoire d'une grande superficie en Amérique (120 000 kms carrés) où celui-ci pourrait mettre en appication ses idées de tolérance et d'humanité.Cette concession était présentée comme le remboursement d'un prêt fait par le père de Penn à Charles quand il était un prétendant au trône en exil.

 

Comme William Penn voulait appeler ce territoire  Sylvanie, pays des forêts, le roi décida qu'on l'appellerait Pennsylvanie , en l'honneur du père de William Penn.

 

 En 1683 des conspirateurs protestants complotèrent d'assasiner le roi en même temps que son frère le duc d'York, lors de leur retour des courses de chevaux de Newmarket (complot de Rye-House, du nom du lieu de rencontre des conjurés). Un contretemps fit échouer le complot et les principaux conspirateurs, ou présumés tels, dont des aristocrates,  furent arrêtés et exécutés, parfois sur des preuves légères. Le duc d'Argyll, puissant arstocrate écossais, s'enfuit. Le duc de Monmouth, le plus âgé des fils illégitime de Charles II (sa mère Lucy Stewart avait été la maîtresse de Charles II quand celui-ci était encore en exil) était apparemment mêlé au complot. Avait-il réellement eu l'intention de faire asssassiner son père ?

 En réaction contre cette offensive des ultras protestants, Lord Danby et les Lords catholiques détenus à la Tour de Londres furent libérés tandis que le frère du roi prenait plus d'influence.
 

En 1685, le roi tomba brutalement malade et tout le monde comprit qu'il allait mourir .

A son frère et successeur James, il demanda de prendre soin de ses maîtresses : sois gentil avec Portsmouth (Louise de Kéroualle) et ne laisse pas la pauvre Nelly (Nell Gwynn) mourir de faim.

A ceux qui l'entouraient, le roi déclara, faisant effort pour rester désinvolte : Je suis désolé, gentlemen, de mettre autant de temps à mourir.

Il semble avéré qu'il se convertit au catholicisme sur son lit de mort - mais avait-il vraiment sa conscience ?

C'était maintenant à son frère James, catholique déclaré, de régner.

 

 

 

 

 

JACQUES II , UN MONARQUE AMBIGU

 

 

 

The_Duke_and_Duchess_of_York_with_their_two_daughters

 James, duc d'York, avec sa femme Anne, née Hyde, et ses deux filles, Mary et Anne (Collections royales).

Tableau de Peter Lely (vers 1668 -1670) auquel ont été ultérieurement ajoutés, vers 1680 (avec une certaine maladresse!), par l'artiste Benedetto Gennari, les portraits des deux filles du couple, plus tard la reine Mary et la reine Anne. Au fond le chateau de Windsor.

Ann, duchesse d'York était morte en 1671. 

 

 

 James avait eu le temps de se préparer à régner.

Avait-il les qualités pour faire un bon monarque ? Il est probabe que sa conception autoritaire de la monarchie n'était plus en phase avec l'évolution du régime britannique.

Mais ce qu'on a appelé son autoritarisme ou ses velléités absolutistes avaient beaucoup à voir avec la situation impossible qui était la sienne : roi catholique dans un pays où les catholiques étaient 2% de la population et surtout où le catholicisme était sinon interdit du moins frappé de peines incapacitantes.

Tout son court règne est marqué par des tentatives maladroites de briser cette contrdiction et aussi placé sous le signe de la haine d'une partie des Protestants contre lui.

Nous  l'appellerons James, pour l'époque où il n'était pas encore roi, puis nous dirons Jacques II pour nous conformer à l'usage français, après son accession au trône - sachant que pour les Anglais il était James II et en Ecosse James VII, la numérotation des souverains écossais restant  particulière à cette époque et ne devenant commune qu'à partir de l'Acte d'Union de 1707 - au profit de la numérotation anglaise d'ailleurs ! 

James était devenu catholique au début des années 1660 en même temps que son épouse Anne Hyde.

On se souvient que James avait épousé discrètement Anne Hyde, fille du Premier ministre de Charles II malgré l'opposition du père, à l'époque un roturier choqué par ce mariage inégal. Par contre Charles II avait poussé son frère à ce mariage,  estimant que les qualités de sérieux de Anne Hyde auraient une bonne influence sur son frère qu'il jugeait faible et irréfléchi.

 Après avoir donné plusieurs enfants à son mari, dont seules survécurent deux filles (qui seront Mary, épouse de Guillaume III, gendre et successeur de son beau-père après la Glorious Revolution de 1688, et Anne,  reine à son tour en 1702 après la mort de son beau-frère Guillaume III à qui elle avait succédé), Anne, duchesse d'York, mourut en 1671.

 

En 1673, le duc d'York se remaria avec une princesse catholique, Marie de Modène.

 

Jacques II n'avait pas la personnalité de son frère, mais il avait quand même des maîtresses, aussi bien quand il était encore le duc d'York, héritier de la couronne, que par la suite, devenu roi..

 

A la différence de Charles II, il était attiré par des filles simples et presque sans beauté.

Charles II disait drôlement : en guise de pénitence, mes directeurs de conscience devraient m'imposer de prendre les maîtresses de mon frère.

Jacques II eut notamment comme maîtresse Catherine Sedley, comtese de Dorchester, qui se demandait pourquoi elle avait été choisie, se trouvant sans beauté et sans esprit - ce qui n'était pas exact au moins pour l'esprit. Mais elle ne cherchait pas à en avoir ou à se mettre en avant.

Il eut aussi comme maîtresse Arabella Churchill, la soeur de John Churchill, brillant officier et courtisan, qui se servit de sa soeur pour faire carrière et devint plus tard le célèbre duc de Marlborough.

On disait d'Arabella Churchill qu'elle n'avait que la peau et les os, un type féminin loin d'avoir du succès à l'époque, mais en revanche elle avait le goût de l'intrigue.

 

Devenu roi, Jacques, dont les sentiments religieux étaient sincères et profonds, n'acceptait pas que ses confesseurs lui fassent des reproches sur sa vie privée : en matière religieuse, je vous écoute, en ce qui concerne mes attachements, cela ne regarde que moi, disait-il.

 

 

 

800px-King_James_II_by_Sir_Godfrey_Kneller,_Bt

 Jacques II (James II ) par Sir Godfrey Kneller.

Le tableau présente le roi comme le souverain d'un pays à vocation maritime (ancre, navires de guerre tirant des salves). Sir Godfrey Kneller, peintre néerlandais, fut le successeur de Peter Lely comme peintre de la haute société anglaise à la fin du 17ème et au début du 18ème siècle.

the National Portrait Gallery, Londres

 en.wikipedia.org

 

 

 

En mai 1685 un nouveau Parlement fut élu et était bien disposé pour le nouveau roi (Loyal Parliament).

Peu de temps après son intronisation Jacques II dut faire face à la rébellion de son neveu le duc de Monmouth.

Celui-ci était le fils d'une des plus anciennes maîtresses de Charles II, Lucy Stewart, morte en 1658.

Monmouth avait servi avec talent comme officier dans les guerres de Charles II.

Puis il avait été mêlé - de façon pas vraiment prouvée - à la tentative d'assassiner Charles II et le duc d'York en 1683 (complot de Rye-House). Exilé avec d'autres mécontents aux Pays-Bas, sous la protection du gendre du roi, Guillaume d'Orange, il attendait son heure.

 

 

 

800px-James_Scott,_Duke_of_Monmouth_and_Buccleuch_by_William_Wissing

Le duc de Montmouth, portrait de Willem Wissing.

National portrait Gallery.

Fils illégitime de Charles II avec Lucy Stewart (morte en 1658) il se maria avec la fille du duc de  Buccleuch en Ecosse et prit le nom de sa femme, Scott , puis le titre de duc de Buccleuch.

 en.wikipedia

 

 

 

 Monmouth débarqua dans le sud de l'Angleterre avec une petite armée de fidèles. En même temps une rébellion dirigée par un puissant aristocrate écossais protestant, le duc d'Argyll, éclatait en Ecosse. les deux tentatives faisaient partie d'un plan concerté décidé depuis les Pays-Bas.

 L'armée de Jacques II, fidèle au souverain légitime, battit les deux rébellions, très facilement pour celle du duc d'Argyll qui n'arriva  pas à soulever les Ecossais au-delà des hommes de son propre clan, les  Campbell.

Monmouth fut battu à Sedgemoor par John Churchill, le meilleur officier de Jacques II (le futur duc de Marlborough)

Les chefs de la rébellion furent arrêtés. Argyll était déjà sous le coup d'une condamnation à mort pour sa participation au complot de 1683 et il fut excuté.

Monmouth fut jugé et condamné à mort. Il implora la clémence de son oncle (qui consentit à lui accorder une entrevue). Jacques II fut intransigeant et Monmouth  fut décapité (dans des conditions lamentables car le bourreau dut s'y reprendre à plusieurs fois).

On a parfois dit que Jacques II avait décidé d'épargner son neveu, qu'on avait exécuté quelqu'un d'autre à sa place et que Monmouth avait été envoyé en France  (Jacques II avait de bonnes relations avec Louis XIV, roi catholique) et que c'était lui l'homme au masque de fer, mais ce n'est évidemment qu'une spéculation sans preuve.

 Après la rébellion de Monmouth eut lieu une série de procès qui condamnèrent à des peines diverses, dont la terrible peine de la pendaison sans provoquer la mort suivie d'écartèlement, de nombreux suspects (procès connus sous le nom de Bloody Assizes, Assises sanglantes) et où s'illustra sombrement le Chief Justice (le plus haut magistrat anglais)  Jeffreys. De nombreux accusés furent transportés aux Antilles comme travailleurs esclaves.

 

 Jacques II autorisa les Catholiques à occuper  les postes les plus élevés du royaume. Il rétablit les relations dipolmatiques avec le Vatican, envoyant comme ambassadeur à Rome Lord Castlemaine et recevant le nonce  apostolique à Londres, Mgr Ferdinando d'Adda. 

Il choisit un confesseur jésuite, Edward Petre, particulièrement détesté par les Protestants.

En 1687 il publia la Déclaration d'Indulgence ou Déclaration de liberté de conscience, par laquelle il annulait l'effet des lois répressives contre les Catholiques et les Protestants dissidents.

Ces derniers, comprenant que le roi, pour soutenir le catholicisme (pour l'imposer disaient ses adversaires) soutenait aussi leur cause, se rapprochèrent des positions royales.

 

Jacques II essayait d'orienter l'opinion et de la convaincre du bien-fondé de sa politique de tolérance.

Lors d'une tournée dans le pays, il déclara : "suppose... there should be a law made that all black men should be imprisoned, it would be unreasonable and we had as little reason to quarrel with other men for being of different [religious] opinions as for being of different complexions" (supposez qu'il y ait une loi qui dirait que tous les hommes de couleur noire doivnt être emprisonnés, ce serait déraisonnable et il y a aussi peu de raison de quereller des hommes parce qu'ils sont d'une autre religion que parce qu'ils sont d'une autre couleur).

 

Outrepassant clairement ses pouvoirs, il décida de nommer des régulateurs pour modifier les autorités municipales et celles des comtés. Beaucoup de ces régulateurs étaient des Baptistes et ils recommandèrent des nouvelles municipalités composées de Quakers, de Baptistes, de Congrégationnalistes, de Presbytériens, et évidemment de Catholiques, avec bien entendu des Anglicans mais ceux-ci sentaient leur supématie leur échapper.

En avril 1688 Jacques II republia la Déclaration d'Indulgence, ordonnant aux clergé anglican de la lire devant les paroissiens dans les églises.

Sept évêques dont l'archevêque de Canterbury  protestèrent et furent arrêtés au grand scandale des Anglicans.

 Les inquiètudes des Anglicans se renforcèrent lorsque la reine Marie de Modène donna naissance à un héritier, James Francis Edward en juin 1688. Désormais il était clair qu'une dynastie catholique allait - si on n'y mettait bon ordre - s'installer durablement en Angleterre.

En août 1688 Jacques publia la convocation pour une élection générale.

 Le 30 juin 1688 un groupe de sept  Lords protestants, aussi bien Tories que Whigs, dont Lord Danby, écrivit au gendre de Jacques II, Guillaume d'Orange, mari de la fille du roi Mary,  en l'invitant à venir en Angleterre pour sauvegarder les libertés et la religion protestante, en l'assurant que 19 Anglais sur 20 seraient avec lui.

 

 

Guillaume n'hésita pas beaucoup.

Il organisa ses troupes et son expédition, forte de plus de 400 vaisseaux et embarquant des soldats hollandais, des huguenots français, des mercenaires suisses et suédois et même deux cent soldats noirs du Surinam, et bien entendu des Britanniques, traversa la mer du Nord, poussée, comme on devait le dire ensuite avec complaisance " par des vents protestants", elle toucha terre près de Torbay le 5 novembre1688 (selon le calendrier julien en usage en Angletrrre, le 15 selon le calendrier grégorien en usage dans le reste de l'Europe, adopté ensuite également en Angleterre).                                            .

 Après un moment de flottement, la majorité de la population - anglicane bien entendu - accueillit les nouveaux arrivants  comme des libérateurs.

Guillaume entra dans Exeter entouré des deux cents soldats noirs vêtus d'uniformes blancs.

 

 

 

 LA GLORIOUS REVOLUTION DE 1688

 

 

 lan_town_burgm_paoil16_large

 Edward Matthew Ward, King James Receiving News of the Landing of William of Orange (le roi Jacques reçoit les nouvelles du débarquement de Guillaume d'Orange); tableau de 1851.

Ce tableau de l'époque vctorienne donne une image crédible de la cour de Jacques II. Le monarque, effondré, vient de recevoir la nouvelle du débarquement et la reine semble l'encourager à ne pas céder au défaitisme en montrant leur fils. Un petit conseil de guerre s'improvise avec des ecclésiastiques catholiques (sans doute le confesseur du roi et le nonce apostolique) tandis que des dames de la cour s'occupent du bébé royal et que des courtisans se doutent que quelque chose d'anormal se passe. Un courtisan écoute derrière un paravent, obstacle bienf faible pour protéger le secret des délibérations royales ! Le tout donne une vague impression de laisser-aller et de mélange entre vie publique et vie privée. Un chien fait partie de la maisonnée. 

http://www.burnley.gov.uk/towneley/http://www.burnley.gov.uk/towneley/

Collection: Towneley Hall Art Gallery & Museum

http://www.bbc.co.uk/arts/yourpaintings/paintings/king-james-receiving-news-of-the-landing-of-william-of-orange 

 

 

 

Jacques II  comprit qu’il avait perdu la partie. Les défections se multipliaient; des officiers, dont  le brillant John Churchill,  promis à un grand avenir  (futur duc de Marlborough) se ralliaient à Guillaume d’Orange.

Le comte de Rochester, beau-frère du roi (frère de sa première femme, Anne Hyde) jusque là un de ses soutiens (le roi lui avait donné le titre comtal du fameux libertin de l'époque de Charles II, mort sans héritier) se prononça pour négocier avec Guillaume.

L'autre fille de Jacques II, Anne (future reine en 1702) se rallia à son beau-frère Guillaume, ce qui peina considérablement le roi.

Jacques II  prit ses dispositions pour que sa femme et son fils puissent quitter l'Angleterre sans attendre; un gentilhomme français aventurier dans l'âme, le comte de Lauzun, allait se charger des les conduire.

Lui-même quitta Londres par une soirée de tempête de décembre 1688 avec quelques fidèles,  après avoir jeté dans la Tamise le grand sceau de l’Etat.

 

Par malchance il fut reconnu sur la côte où il cherchait à s’embarquer; il fut arrêté et reconduit à Londres, où des tentatives de tractations avec Guillaume eurent lieu.

Puis Guillaume d’Orange donna des ordres de façon à permettre au roi de s'enfuir et Jacques II s’embarqua pour la France.

Guillaume d’Orange entra dans Londres sous les vivats de la population, environné de ceux qui l’avaient appelé et de ceux qui se ralliaient à lui, soit presque tout le monde.

L'ambassadeur français nota que la plupart des dames portaient des rubans orange dans les cheveux et une foule de gens tenaient des oranges à la main en signe de bienvenue.

Néanmoins pendant la vacance du pouvoir les maisons et les biens des catholiques avaient été pillés. Guillaume avant d'entrer à Londres  avait donné des ordres pour que personne ne soit molesté et ses envoyés  firent apparemment ce qu'il fallait pour rétablir le calme.

L'ambassade d'Espagne ayant été pillée, Guillaume écrivit au roi d'Espagne pour présenter ses excuses (en ajoutantt que les violences avaient été le fait de la populace durant la vacance du pouvoir) ; il termina sa lettre en disant qu'il ne faisait pas partie de ceux qui pensent qu'on peut ou qu'on doit persécuter les gens pour leur croyance (une petite leçon donnée au passage aux Espagnols qui n'étaient pas un modèle de tolérance).

(cité par Bernard Cottret, La Glorieuse Révolution, 1988).

Mais ceux qui avaient appelé Guillaume en Angleterre étaient en général moins tolérants que lui envers les catholiques.

 Le seul dignitaire du gouvernement de Jacques II qui resta en place jusqu'au dernier moment fut le Lord Chancellor, Jeffreys, qui s’était rendu très impopulaire par la répression de la rébellion de Montmouth.

Jeffreys essaya de s'enfuir;  il fut arrêté et emprisonné et il mourut de maladie quelques mois après.

Malgré cela, Guillaume d’Orange n’avait pas l’intention de punir qui que ce soit. Lui et son épouse Mary furent couronnés roi et reine,  après que les Pairs aient constaté que la fuite de Jacques II équivalait à une abdication. Le nouveau roi prit naturellement le nom de Guillaume III dans l’ordre numérique des souverains anglais.

Le couronnement de Mary  sauvegardait la thèse de la continuité dynastique puisqu’elle était la fille du roi déchu.

Certains comme Lord Danby  auraient même voulu qu’elle seule soit couronnée mais ce n’était pas l’intention de Guillaume qui ne voulait pas se contenter d’être prince consort.  Quant à la suggestion du comte de Rochester qui voulait préserver les droits du fils de Jacques II en instituant une régence, elle avait encore moins de chance d'être suivie et Rochester se rallia à  Guillaume.

Dans la foulée un nouveau Parlement était élu et son premier travail était de voter le Bill of Rights (Loi de déclaration des Droits) qui posait les bases de la monarchie parlementaire et reconnaissait les droits intangibles des citoyens.

Quelques jours après avoir été couronnés roi et reine d’Angleterre, Guillaume et Mary étaient couronnés roi et reine d’Ecosse à Londres, avec l’approbation du Parlement écossais, sans faire le déplacement en  Ecosse.

Guillaume récompensa ses partisans. Parmi d'autres à recevoir titres et honneurs, John Churchill fut créé comte de Marlborough - il sera plus tard fait duc à l'époque de la reine Anne.

La Glorious revolution ou Bloodless Revolution (révolution non sanglante) comme devaient l’appeler les Anglais avec fierté,  avait atteint son but.

Pendant ce temps  Jacques II arrivait en France où son cousin le roi Louis XIV l’accueillait à bras ouverts, lui attribuant le château de Saint-Germain comme résidence et lui promettant assistance pour récupérer son trône.

 

 

 

 

 UN FRANCAIS A LONDRES, LE COMTE  DE LAUZUN

 

 

 

Comme on l'a vu, la reine Marie de Modène et l’héritier du trône avaient quitté l'Angleterre sans attendre sous la protection du comte de Lauzun.

 .

Le comte de Lauzun venait d'arriver en Angleterre après un premier séjourlors de l'insurrectio de Monmouth où il était venu s'engager dans les troupes royales.

Lauzun avait eu des débuts prometteurs en France, suivis de déboires.

Ce seigneur de bonne noblesse désargentée qui servait dans l’armée royale, d’abord connu comme comte de Puyguilhen,  puis comte de Lauzun,   ambitieux et entreprenant, avait voulu mettre les bouchées doubles.

Jusque-là seules ses frasques l’avaient fait remarquer.

Amant intermittent de sa cousine  la princesse de Monaco, et dédaigné par elle (elle était devenue la maîtresse  de Louis XIV), pour se venger, un jour qu’il faisait très chaud et que les dames de la cour, dont la princesse, étaient allongées à même le carrelage pour trouver un peu de fraîcheur dans un salon des Tuileries (c’était avant que la cour se transporte à Versailles) , Lauzun, en virevoltant, avait exprès enfoncé sa chaussure à talon haut dans la paume de la princesse et s’était éclipsé ensuite.

Le prince de Monaco (qui passait le plus clair de son temps à Paris) cherchait Lauzun pour se venger et Louis XIV avait dû le calmer.

Lauzun  raconta bien plus tard (environ quarante ans après) à Saint-Simon, son parent, ami et voisin, qui le rapporta dans ses Mémoires, quelques tours qu’il avait joués  à Louis XIV pour faire rater ses rendez-vous avec la princesse de Monaco.

Mais ce n’était rien par rapport à ce qui allait suivre.

Lauzun avait souhaité obtenir la place de Grand maître de l’artillerie, poste pour lequel il n’avait aucune qualité particulière, étant de surcroit trop jeune. Mais le roi avait eu la faiblesse de lui promettre le poste.

Voyant que le roi hésitait, prévenu contre lui par le ministre Louvois, Lauzun se dit qu’avec l’appui de Madame de Montespan, maîtresse en titre du roi, il aurait plus de chance d’obtenir ce qu’il voulait.  Il en parla à Mme de Montespan qui lui promit son appui.

Mais Lauzun avait des doutes sur l’appui de Mme de Montespan   Il eut alors une idée  assez délirante, qui dénote une personnalité curieuse. Il savait que le roi et Mme de Montespan se retrouvaient le soir dans un petit cabinet qui, évidemment, avait un lit.

Il eut l’idée, avec l'aide d'une suivante de Mme de Montespan qui n'avait rien à refuser à Lauzun, de se glisser sous le lit.

Quand le roi et sa maîtresse vinrent se coucher, il écouta leur conversation, et entendit Mme de Montespan le critiquer férocement et le roi approuver et regretter de lui avoir promis la poste.

Puis le roi et sa maîtresse quittèrent le cabinet et Lauzun, furieux, sortit de sous le lit.

 Le lendemain, il rencontra  Mme de Montespan et lui demanda si elle avait parlé au roi et comme elle répondait qu’elle avait bien parlé en sa faveur, il la traita de « pute à chiens » (!) et  lui rapporta exactement ce qu’elle avait dit – ce qui évidemment était une façon d’agir complètement imprudente.

Affolée la marquise de Montespan alla trouver le roi et tous deux se demandèrent comment Lauzun pouvait avoir appris ce qu’ils s’étaient dit dans l’intimité.

 

La nomination fut reportée. Lauzun qui aurait peut-être gardé des chances en faisant profil bas –mais ce n’était pas son genre – demanda audience au roi. Celui-ci lui expliqua pourquoi il se sentait obligé de différer la nomination.

Lauzun tira alors son épée et la cassa sous son talon en disant qu’il préférait briser son épée plutôt que la mettre au service d'un roi qui ne tenait pas ses promesses.

Louis XIV (on peut imaginer le roi  faisant un effort pour se maîtriser) jeta alors sa canne  par la fenêtre en disant : et moi je préfère jeter ma canne plutôt que de m’en servir pour frapper un gentilhomme.

Saint-Simon qui rapporte la scène, d’après ce qui lui en a dit Lauzun, commente :  c’est peut-être le plus beau mot de Louis XiV .

Après cet épisode, Lauzun fit un court séjour à la Bastille mais le roi qui l'aimait bien, le fit sortir rapidement et  lui offrit des compensations.

Peu après  on apprenait la nouvelle sidérante (Madame de Sévigné en fut toute retournée et l'écrivit à sa fille) que Lauzun allait se marier avec la duchesse de Montpensier, fille du duc d'Orléans, cousine du roi, dite La Grande Mademoiselle.

Elle était plus vieille que Lauzun mais surtout proche parente du roi et richissime ; son mariage avec un homme de moyenne noblesse et sans fortune  était une mésalliance ; mais Lauzun, malgré un physique peu flatteur –petit et assez laid, était un séducteur.

Louis XIV, au grand étonnement de tous, accepta l’idée du mariage mais aurait souhaité qu'il se passe dans la discrétion.

Au contraire Lauzun fit des commandes pour une cérémonie magnifique.

Louis XIV, agacé par la gloriole de Lauzun qui voulait montrer à tout le monde qu’il faisait le mariage du siècle, retira son autorisation au mariage sur les instances de sa famille, choquée par la mésalliance.

Puis, peut-être mécontent parce qu'on parlait d'un mariage secret,  il ordonna d'arrêter Lauzun (1671) qui fut conduit à la forteresse de Pignerol,  enclave française dans les Alpes italiennes, où languissait déjà l’ancien surintendant des Finances Fouquet.

Lauzun fut mis ainsi pendant presque dix ans hors circuit, au désespoir de la Grande Mademoiselle. Pour obtenir sa libération, la Grande Mademoiselle  fut obligée à faire des donations au roi et à ses enfants illégitimes.

Quand Lauzun fut libéré, il n’était plus question de mariage avec la Grande Mademoiselle (bien qu'on dise qu'il y a quand même eu un mariage secret).

Lauzun développa ensuite un grand talent pour les jeux de cartes et ramassa pas mal d’argent, mais il était - cela se comprend - toujours exclu de la cour.

Il passa en Angleterre en octobre 1688, peut-être pour utiliser ses talents aux cartes,  et un mois après, c'était la Glorious Revolution.

Le roi Jacques II fit appel à Lauzun, qui avait déjà du se signaler à son attention, pour mettre à l'abri la reine Marie de Modène et le prince de Galles âgé de quelques mois. Lauzun et la reine s'embarquèrent pour la France.

Certains prétendent  que Lauzun était l’amant de la reine ou qu'il l'est devenu à partir de moment.

Quelques jours après, les royaux fugitifs, accompagnés de Lauzun, arrivaient à Versailles où Louis XIV  les attendait.

Là, Lauzun, théâtral, jeta son chapeau et ses gants aux pieds de Louis XIV et s’agenouilla devant lui. Le roi le releva et le remercia.

A partir de là Lauzun fut rétabli dans l’estime du roi et reçut le titre de duc, des commandements  et des honneurs

 Mais comme il le fit remarquer à Saint-Simon,  dans ses relations avec le roi, il devait toujours y avoir une sorte de gêne…

Lauzun allait encore jouer un rôle dans la tentative de Jacques  II de récupérer son trône.

 

 xir161076

Le comte puis duc de Lauzun, en tenue de chevalier de la Jarretière. Tableau de Alexis-Simon Belle

Musée de Saumur.
Pour le récompenser de son aide, Jacques II en exil fit Lauzun chevalier de la Jarretière lors d'une cérémonie à Notre-Dame de Paris. Son portrait a été peint par Alexis-Simon Belle, peintre français qui se fit une clientèle prmi les Jacobites exilés.

Lauzun, après son retour en faveur, mena une carrière de courtisan comblé et mourut à 90 ans après avoir raconté à son parent, voisin et ami Saint-Simon, bon nombre de récits de la cour de Louis XIV, que Saint-Simon a recueillis dans ses Mémoires.

 Wikipedia

 

 

LA REBELLION IRLANDAISE

 

 

 

 

 

471px-William_III_of_England

 Guillaume III ou William III (1659-1702), prince d'Orange, roi d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande. 

Portrait de Willem Wissing.

Rijksmuseum Amsterdam

 

 

 A part Louis XIV, le reste de l’Europe reconnut les nouveaux monarques et paradoxalement, le Pape envoya ses félicitations à Guillaume d’Orange devenu Guillaume III (ou William III). Il est vrai que le Pape s’entendait mal avec Louis XIV qui prétendait défendre un catholicisme à sa manière.

Le remplacement de Jacques II par Guillaume et Mary avait été massivement approuvé en Angleterre. En Ecosse, le Parlement se prononçait pour  les nouveaux monarques, mais sans faire l’unanimité.

Une rébellion de « jacobites » écossais   (le  mot « jacobite » apparait à ce moment pour désigner les partisans de Jacques II )  remporta un succès à la bataille de Killiekrankie (juillet 1689) avant d'être défaite un mois après (son chef Lord Dundee avait été mortellement blessé à Killiekrankie et les pertes jacobites durant cette bataille avaient fortement diminué l'armée rebelle qui ne put s'opposer aux forces gouvernementales).

Les partisans jacobites en Ecosse furent pourchassés et parfois éliminés physiquement de sang froid.

Lors du massacre de Glencoe (février 1692), des militaires gouvernementaux appartenant en majorité au clan Campbell massacrèrent des membres du clan Macdonald qui venaient pourtant de faire leur soumission - les femmes et enfants des Macdonald mourant ensuite de froid par suite de l'incendie de leurs habitations.


Les juges écossais ouvrirent une enquête en invoquant pour la première fois semble-t-il, que les ordres reçus ne peuvent justifier des actes illégaux de la part de militaires :

" Bien que l'ordre d'officiers supérieurs soit très absolu, aucun ordre allant contre les lois de la nature ne lie le soldat " .

D'ailleurs des officiers subalternes refusèrent d'obéir : "les lieutenants Francis Farquhar et Gilbert Kenndy ont préféré briser leurs épées plutôt que d'exécuter les ordres. Ils furent arrêtés et emprisonnés, mais furent relaxés et témoignèrent plus tard contre leurs officiers supérieurs" (article Wilkipedia, Le massacre de Glencoe).

 Mais les  auteurs principaux du massacre, protégés par le roi Guillaume III, dont ils avaient exécuté et peut-être outrepassé les ordres, échappèrent à tout châtiment et reçurent des promotions.

 

Dans les Iles britanniques il restait l’Irlande. Or les nouveaux monarques ne furent pas reconnus par le Parlement de Dublin – l’Irlande constituant comme l’Ecosse un royaume séparé (ou une fiction de royaume séparé) mais ayant le même souverain que l’Angleterre.

Depuis quelques années , un aristocrate anglo-irlandais catholique, Lord Tyrconnel, représentait le roi en Irlande et avait favorisé les catholiques dans l'armée et les postes d'importance. 

 Une partie des Anglicans irlandais  faisaient cause commune avec les Catholiques, majoritaires. Seuls les Protestants d’Ulster  reconnaissaient les nouveaux souverains anglais.

Les camps se formèrent et une armée catholique alla assiéger les villes d’Ulster où les Protestants s'étaient regroupés..

Louis XIV poussa Jacques II  à se rendre en Irlande pour prendre la tête des insurgés, en lui apportant un soutien militaire.

Le roi débarqua donc en Irlande en mars 1689 avec quelques conseillers français dont le comte de Rozen, qu'il nomma chef de son armée et le comte d'Avaux, ambassadeur de Louis XIV.

Pour les Catholiques, soutenir Jacques II devenait une cause nationale irlandaise – et plus tard les nationalistes  irlandais feraient de cet épisode un moment de la longue lutte des Irlandais pour leur indépendance – même si à l’époque il était seulement question de savoir qui règnerait à Londres. Mais en soutenant Jacques II, les Irlandais catholiques espéraient  aussi obtenir des avantages politiques.    

En Angleterre, la révolte des Irlandais resserra les rangs de la société anglaise autour des nouveaux monarques pour la cause sacrée du protestantisme et de la liberté politique.

 

 

 

 

 

PURCELL ET  LILLIBURLERO

 

 

 

Le comte de Wharton, un aristocrate et politicien whig, composa – sur une musique sans doute déjà existante- une chanson promise à un grand succès Lillibulero (on trouve aussi fréquemment l'orthographe Lilliburlero), qui, sur un rythme irlandais, se moque des révoltés.

Wharton faisait partie de la dernière génération des rakes, qui n’avaient pas complètement disparu.
On a raconté qu’un jour qu’il était ivre, il entra dans une église et se soulagea contre l’autel.

Cet exploit lui fut reproché longtemps après en pleine chambre des Lords par Lord Danby, devenu duc de Leeds, et le fait que Wharton n’ait pas nié l’accusation montre probablement qu’il avait fait ce qu’on lui reprochait.

C'était par ailleurs un homme d'esprit, charmant et qui finit sa vie chargé de titres, élevé notamment au rang de duc. Notons que curieusement, son fls se rapprocha ensuite des prétendants Stuarts, mena une vie d'aventures et d'expédients et mourut en exil après avoir été grand-maître de la franc-maçonnerie et avoir rompu avec elle.

Le compositeur Henry Purcell, le plus illustre compositeur britannique (avec Haendel, mais celui-ci n’était pas Anglais de naissance)   produisit sur le champ  une version  instrumentale de la chanson sous le titre A New irish tune (un nouvel air irlandais),  mais c’est évidemment la version chantée qui eut un grand succès avec ses paroles narquoises :

 

Ho, brother Teague, dost hear the decree?

Lillibullero bullen a la

We are to have a new deputy

Lillibullero bullen a la

 (Oh frère Teague (appellation ironique des Irlandais) as-tu entendu le décret ?

Nous avons un nouveau député (deputy, représentant d'une autorité, ici le roi)

Refrain

Lero Lero Lillibullero

Lillibullero bullen a la

Lero Lero Lero Lero

Lillibullero bullen a la

 

Oh by my soul it is a Talbot

Lillibullero bullen a la

And he will cut every Englishman's throat

Lillibullero bullen a la

 ( Oh sur mon âme, c'est un Talbot (Lord Tyrconnel appartenait à la famille Talbot, dont le nom est aussi celui d'un chien de chasse)

Et il coupera la gorge de tous les Anglais)

 

Refrain

 

Now Tyrconnell is come ashore

Lillibullero bullen a la

And we shall have commissions galore

Lillibullero bullen a la

 (Maintenant Tyrconnel a débarqué

Et nous aurons des postes en pagaille)

 

Refrain

 

And everyone that won't go to Mass

Lillibullero bullen a la

He will be turned out to look like an ass

Lillibullero bullen a la

 (Et quiconque n'ira pas à la messe

Passera pour un âne)

 

Refrain

 

Now the heretics all go down

Lillibullero bullen a la

By Christ and St Patrick 's the nation's our own

Lillibullero bullen a la

 (Maintenant c'est fini avec les hérétiques (Protestants),

Par Christ et Saint Patrick, le pays est à nous)

 

Refrain

 

There was an old prophecy found in a bog

Lillibullero bullen a la

The country'd be ruled by an ass and a dog

Lillibullero bullen a la

 (Il y a une vieille prophétie trouvée dans une latrine,

Que le pays sera gouverné par un âne et un chien)

 

Refrain

 

Now this prophecy is all come to pass

Lillibullero bullen a la

For Talbot's the dog and Tyrconnell's the ass

Lillibullero bullen a la

 (Maintenant la prophétie va se réaliser,

Car le chien c'est Talbot et l'âne c'est Tyrconnel)

 

Les paroles sont reproduites d'après Wikipedia en anglais, qui donne l'orthographe Lillibulero, mais l'orthographe la plus fréquente pour le titre de la chanson semble maintenant Lilliburlero.

 Le refrain semble une imitation de la phrase irlandaise  (gaélique) :

  Lile ba léir é, ba linn an lá,

Celle-ci pourrait avoir ce sens :  "Lilly was clear and ours was the day" (Lilly était clair et notre jour était venu - allusion, comme le rappelle la chanson, à la prophétie d'un astrologue, Lilly, qui avait prédit qu'un roi catholique régnerait sur les Iles britanniques.

 (d'après Wikipedia)

 

L’air (sans les paroles) devait rester en honneur dans l’armée britannique. L'air est toujours joué lors de manifestations comme l'anniversaire officiel de la reine (Trooping the colours).

On peut l'entendre dans le film de Stanley Kubrick Barry Lyndon  qui se déroule au 18ème siècle, et c’est la marche officielle du régiment du génie.

 

Purcell avait été en quelque sorte le compositeur officiel de Jacques II.

Quelles étaient ses véritables sympathies politiques, s’il en avait ? Il était marié avec une catholique ce qui lui avait valu quelques difficultés avec le clergé anglican qui avait autorité sur les compositeurs de musique sacrée et les maîtres de chapelle, mais rien de vraiment pénible.

Lorsque Guillaume remplaça Jacques, Purcell se mit à composer avec allégresse des chants en l’honneur des nouveaux monarques. Il salua pour  commencer la Glorious Revolution dans une cantate composée au début de 1689  pour la fête du comté du Yorkshire, un comté dont les personnes influentes avaient été très impliquées dans le changement de régime, notamment Lord Danby.

Dans cette cantate, dont les paroles sont de Tom d’Urfey, un écrivain et auteur de théâtre assez célèbre à l’époque,  le changement de régime est ainsi évoqué :

 

Sound trumpets, sound! beat ev'ry drum

Till it be known through Christendom

This is the knell of falling Rome

 

Sonnez trompettes, sonnez ! battez tous les tambours

Jusqu'à ce qu'on sache dans la Chrétienté

Que c'est le glas pour la chute de Rome

 [Rome est ici la capitale du catholicisme, bien entendu]

 

Tom d’Urfey intégra cette ode dans un de ses recueils d’oeuvres poétiques –si le mot poésie convient, intitulé Pills against melancholy (pilules contre la mélancolie).

Purcell écrivit une ode pour l’anniversaire de la reine Mary tous les ans (jusqu’à la mort de la reine qui survint à la fin de 1694, quelques mois avant la mort de Purcell).

Dans ses odes, Purcell (ou ses paroliers) fait l’éloge de Mary et de son valeureux époux,  Guillaume III,  champion du protestantisme, le protecteur de our dear religion (notre chère religion) et de « notre liberté », qui contrairement aux autres monarques, ne se bat pas par procuration (proxy) mais en personne, et échappe victorieusement à tous les dangers du champ de bataille.

 

 gb-2009-ebr002-1st-henry-purcell-vfu-21947-p

 Timbre britannique à l'effigie de Henry Purcell (2009).

 http://www.wooliebackcollectables.com/gb-2009---sg2872-1st-henry-purcell-vfu-21947-p.asp

 

 

 

 

 

 

 

 LE DESTIN DECIDE A LA BATAILLE DE LA BOYNE ET A  AUGHRIM

 

 

 

 

Jacques II espérait reconquérir l’Angleterre à partir de l’Irlande – qui lui était majoritairement favorable, à l’exception de l’Ulster où les Protestants étaient nombreux (installés surtout après la reconquête de l’Irlande par Cromwell). Les protestants se réfugièrent dans deux villes, Derry (ou Londonderry) et  Enniskillen.              .

L’armée jacobite assiégea Derry en Ulster pendant cinq mois inutilement. Malgré un siège marqué par une famine épouvantable, les Protestants résistèrent aux cris de  No surrender  (pas de reddition) qui devint la devise des « orangistes » pour les siècles suivants, jusqu'au moment où ils purent être ravitaillés. Les Jacobites levèrent le siège et ne parvinrent pas non plus à prendre Enniskillen.

Les troupes de Guillaume III débarquèrent sous les ordres du maréchal comte de Schomberg, un huguenot français exilé depuis la révocation de l'édit de Nantes par Louis XIV (1685).

En mars 1690, des troupes françaises débarquèrent sous le commandement du comte de Lauzun, l’homme qui s’était illustré dans l’évasion de Marie de Modène.

Lauzun était loin d’avoir les aptitudes militaires de ses prétentions. 

De plus, Louis XIV exigea en échange l'envoi en France de régiments irlandais pour participer aux guerres continentales que la France soutenait au même moment,  ce qui dégarnissait d'autant les forces jacobites.  

 Puis Guillaume III débarqua  en juin 1690, renforçant les troupes du maréchal de Schomberg. Des Hollandais, des Danois, des huguenots français servaient dans son armée, au côté des Anglais et des Ecossais protestants.

Les deux souverains s’affrontèrent à la bataille de la Boyne (1er juillet 1690 - commémorée le 12 juillet aujourd'hui par suite du changement de calendrier).

Ce fut un désastre pour les Irlando-français. Leur armée fut prise de panique et Jacques II ne fut pas le dernier à s’enfuir. Le maréchal comte de Schomberg fut tué dans la bataille.

Jacques II arriva à bride abattue à Dublin et rencontra la femme de Lord Tyrconnel : Ah ; madame dit le roi, comme vos compatriotes courent vite.

Pas si vite que votre Majesté, je crois qu’elle a gagné la course,  répondit sans se démonter Lady Tyrconnel.

 

Jacques II quitta l'Irlande sans attendre pour regagner la France et sa popularité dégringola chez les Irlandais, pour qui il fut désormais Séamus an Chaca ou James the shit (James la merde).

Guillaume III entra dans Dublin, accueilli triomphalement, en tout cas par les Anglicans.

La bataille de la Boyne n’avait pas tout réglé. Les deux armées prirent leurs quartiers d’hiver et ravagèrent le pays sans trop s'occuper de qui était ami ou ennemi.

La ville de Limerick résista victorieusement aux troupes de Guillaume III mais la situation était devenue défavorable aux Jacobites et à leurs alliés français. Lauzun et Tyrconnel rentrèrent en France.

La résistance contre Guillaume III  fut dirigée par le jeune duc de Berwick (fils illégitime de Jacques II et d’Arabella Churchill) qui avait  rejoint le camp de son père, et par le chef irlandais Searsfield. Berwick eut à combattre son propre oncle, John Churchill, comte de Marlborough, le frère d'Arabella , qui vint un moment en Irlande commander les troupes de Guillaume III.

Tyrconnel revint de France avec quelques officiers français : le marquis de Saint -Ruth, qui fut nommé chef de l'armée jacobite, et ses seconds, les marquis de Tessé et d'Usson; mais il ne ramenait pas de troupes.

La deuxième bataille  eut lieu  à Aughrim en juillet 1691 et les franco-irlandais furent de nouveau battus. Le marquis de Saint-Ruth fut tué.

Tyrconnel mourut peu de temps après, peut-être de chagrin ou empoisonné. Divisés sur la conduite à tenir,  les insurgés  durent entrer en négociation avec le chef de l'armée de Guillaume III, le prudent  néerlandais Ginkell, et signèrent le traité de Limerick en octobre 1691.

Guillaume III n’était  pas  un homme insensible. Il accorda des conditions généreuses aux rebelles vaincus et la liberté de culte. Tous ceux qui voudraient partir le pourraient avec leur famille.

Malheureusement, cette offre déboucha sur un drame humain. Les bateaux où les combattants catholiques avaient embarqué d’abord se trouvèrent complets et une grande masse de femmes cet d’enfants resta sur le rivage,  laissée sans protection, poussant une clameur de désespoir telle qu’elle émut même les protestants les plus endurcis aux malheurs des catholiques irlandais, selon un témoin.

Des femmes qui s’étaient accrochées aux bordages furent refoulées sans pitié par les matelots anglais ou hollandais et se noyèrent.

Quant aux concessions politiques de Guillaume III, les protestants anglais, redevenus tout-puissants en Irlande, firent en sorte de les réduire à pas grand-chose.

 

Mais un avis anonyme de l'époque, adressé au ministre de la guerre de Louis XIV, Louvois, peut-être par un des officiers français de l'expédition d'Irlande, rappelait cette vérité :  les Anglais, qu'ils soient Protestants ou Catholiques, regardent comme une nécessité que l'Irlande soit toujours dans un état de dépendance par rapport à l'Angleterre, ou pour mieux dire, d'esclavage...

   (cité par Bernard Cottret, La Glorieuse Révolution, 1988).

 

Considérées comme des  victoires protestantes contre le catholicisme, en Angleterre et encore plus dans les milieux   protestants d'Irlande, les batailles de La Boyne et d'Aughrim ne furent pas considérées comme telles dans les pays catholiques  qui étaient en guerre contre Louis XIV.  Elles furent considérées comme des défaites de Louis XIV et de ses alliés.

Le Pape lui-même semble avoir félicité Guillaume III pour ses victoires et la catholique Autriche fit célébrer des Te Deum  pour remercier Dieu d'avoir donné la victoire aux ennemis du roi de France...

 

 

 

CE QU'ILS SONT DEVENUS

 

Guillaume III passa le reste de son règne à faire la guerre (notamment à Louis XIV) et à accroître la puissance anglaise.

Quant à son épouse Mary , femme sensible et délicate, elle mourut en décembre 1694.

Purcell qui parait avoir eu une vraie affection pour la reine,  composa la musique pour ses funérailles, en réutilisant notamment une marche impressionnante qu’il avait composée pour la reprise de la pièce The Libertine de Shadwell  (ce qui n’était pas choquant à l’époque).

Quelques mois après, Purcell mourait à son tour à 37 ans, et lors du service funèbre à la cathédrale Saint Paul, on joua encore la marche et la canzona utilisées pour les obsèques de la reine.

Guillaume III eut quelques maîtresses mais on lui prête des tendances homosexuelles. il aimait être entouré de beaux jeunes gens dont il favorisait la carrière.

Les rumeurs étaient parvenues jusqu'à lui (si c'étaient des rumeurs...) et il s'écriait : quel monde, on ne peut pas aimer la compagnie de gens agréables sans être accusé de je ne sais quoi !

 

 Guillaume III mourut en 1702. C’est sa fille Anne qui lui succéda. Elle était la dernière des Stuarts (du moins si on ne compte pas la branche de Jacques II, exilée en France). Mariée au Prince de Danemark, elle n'avait pas d'enfant.

Elle eut un règne parfois houleux, placé d'abord sous l'influence de son amie de jeunesse, Sarah Churchill, comtesse puis duchesse de Marlborough.

L'épouse du célèbre chef militaire fut durant quelques années la femme "derrière le trône", dirigeant les actes et les pensées de la reine. Sarah, femme belle, énergique et franche, pensait agir pour le bien de l'Angleterre; elle était liée aux Whigs et favorisait  sans état d'âme  la carrière de son mari qui dirigeait les forces anglaises en lutte presque permanente contre la France de Louis XIV entre la fin du 17ème siècle et les premières années du 18ème.

La reine, fatiguée d'être régentée sans ménagement par Sarah, accorda plus de sympathie à une nouvelle amie, Abigaïl Masham - que Sarah lui avait présentée. La reine et Sarah Churchill se brouillèrent définitivement, entraînant la disgrâce de Marlborough qui s'exila avec sa femme.

Sous  l'influence d'Abigaïl Masham, la reine laissa les Tories exercer le pouvoir et les ministres tories, Harley, titré comte d'Oxford, Saint-Jonh, titré vicomte Bolingbroke, se disputer violemment la prééminence, en dépit des tentatives pour les réconcilier de leur ami commun, Jonathan Swift, l'auteur des Voyages de Gulliver.

Le règne d'Anne fut marqué par l’Acte d‘Union avec l’Ecosse (1707) qui fondait le Royaume-Uni de Grande-Bretagne.

Elle mourut sans enfant en 1714.        .

A la mort de la reine, les politiciens tories durent abandonner le pouvoir - les politiciens whigs coupèrent court à une tentative des Tories de rétablir la branche en exil  des Stuarts sur le trône.

Avec l’arrivée  du  successeur de la reine, les Whigs reprirent le pouvoir, même si le roi aurait préféré s'appuyer sur les Tories, toujours plus favorables au pouvoir royal.

Le nouveau roi prit, qui prit  le nom de  George Ier, était un Allemand,  prince-électeur de Hanovre (électeur car il était l’un des grands électeurs de l’empereur germanique). Il était devenu sucesseur désigné de la reine en application de l'Acte d'établissement de 1701, étant le parent le plus proche de la lignée protestante, seule habilitée à régner (il existait des dizaines de parents plus proches de la reine décédée, mais tous catholiques et donc disqualifiés).

Le couple Marlborough rentra en grâce : "J'espère que vos ennuis sont maintenant terminés", déclara le nouveau roi au duc de Marlborough.

 

800px-Sarah_Churchill_Duchess

Sarah Churchill, duchesse de Marlborough, par Sir Godfrey Kneller.

La duchesse de Marlborough fut l'amie de la future reine Anne et resta sa plus proche conseillère jusqu'à leur brouille définitive. Elle seconda la carrière politique et militaire de son mari et après la mort de celui-ci, elle fut considérée comme une des femmes les plus riches d'Angleterre. Elle mourut à 84 ans en 1744.

Winston Churchill était l'un des descendants direct de John et Sarah Churchill, mais non le détenteur du titre de duc de Marlborough, qui est toujours porté actuellement.

Wikipedia

 

 

 

 A la cour du nouveau roi George, trois femmes survivantes de règnes précédents se retrouvèrent un jour : c’était Louise de Kéroualle, maîtresse de Charles II,  Catherine Sedley, Comtesse de Dorchester,   maîtresse de Jacques II et  Elizabeth Hamilton,  comtesse d'Orkney, maîtresse de Guillaume III.

Catherine Sedley déclara alors avec une certaine dose d’auto-dérision : qui aurait cru que nous, les trois putains, nous nous retrouverions ici !

Certains politiciens allaient réussir l'exploit d'une longévité remarquable dans une époque troublée : Lord Danby, qu'on avait vu ministre de Charles II, fut encore ministre de Guillaume III et conseiller de la reine Anne, près de quarante ans après ses débuts. Devenu duc de Leeds, il était considéré comme un homme de grande expérience et une sorte de monument de la  politique anglaise, mais n'avait toujours pas plus d'amis qu'à ses débuts. La vie publique était désormais moins dangereuse et l'Angleterre commençait à être ce pays de modération et d'équilibre que Montesquieu et Voltaire allaient montrer en exemple à toute l'Europe.

 

Après son échec en Irlande, Jacques II allait désormais vivre comme un roi en exil avec sa petite cour de Saint-Germain-en-Laye, composée de Catholiques et d’Anglicans.

Finalement ne plus être roi ne paraissait pas lui peser plus que ça et il remerciait chaque jour Dieu de lui avoir enlevé son royaume, même s'il ne renonçait pas à prétendre être le monarque légitime d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande..

Visitant le monastère de la Trappe, il rencontra un vieux soldat devenu moine qui vivait comme un ermite dans la forêt qui entourait le monastère.

Le roi lui demanda si sa vie n'était pas trop dure et le soldat lui répondit que sa vie d'aujourd'hui était bien moins dure que celle qu'il avait quand il était soldat.

Comme c'est vrai, dit le roi, on fait des choses pour les rois de la terre qu'on ne fait pas pour Dieu et pourtant, que sont les rois de la terre, comparés à Dieu.

Comment juger Jacques II ? Ses déclarations en faveur de la tolérance  le rendent sympathique. Mais on peut lui reprocher , surtout de la part d'un souverain qui se voulait chrétien, d'avoir accepté des sentences de mort contre ses adversaires, notamment  à l'époque des Assises sanglantes, condamnations parfois accompagnées de traitements barbares qui nous paraissent insupportables. Est-ce faire preuve d'anachronisme de lui reprocher cette attitude, et pouvait-il s'opposer aux formes de la justice de son temps?

Il semble que Guillaume III, malgré la responsabilité qu'il encourt dans le massacre de Glencoe, fut plus humain et répugnait plus à verser le sang inutilement - du moins hors des batailles.

Au demeurant, combien de gouvernants dits démocratiques de notre époque ont eu plus de scrupules quant au sang versé lorsque le prétexte était "la raison d'Etat"?

Conséquence inattendue de la présence des jacobites (partisans des Stuarts) sur le continent et notammment en France, il semble que le développement de la franc-maçonnerie fut causé par la présence de francs-maçons parmi les exilés, qui répandirent cette forme de sociabilité fondée sur la tolérance.

Les déclarations de Jacques II selon lesquelles Catholiques et Protestants devaient vivre en bonne entente ne contredisent pas le message de tolérance de la franc-maçonnerie.

Celle-ci se développa au début du 18ème siècle en Angleterre dans un milieu majoritairement Protestant et Whig : la Grande Loge d'Angleterre est fondée en 1717 (mais elle ne fait que regrouper des loges déjà existantes donc elle ne crée pas la franc-maçonnerie) et les Constitutions maçonniques rédigées par le pasteur presbytérien Anderson paraissent en 1723. La franc-maçonnerie du temps accepte des adhérents de toute religion (sauf les "athées stupides", selon les Constitutions d'Anderson) et s'interdit les discussions politiques.

 

Après la mort de Jacques II, son fils et son petit-fils  hériteront de ses prétentions à la couronne et essaieront sporadiquement de revenir en Angleterre (ou en Ecosse) pour récupérer leur trône.

Comme les Stuarts étaient une famille d'origine écossaise (les Stuarts avaient d'abord régné sur l'Ecosse), leur cause resta populaire dans certains milieux écossais (alors que d’autres Ecossais étaient incontestablement du côté opposé) ;  un peu comme en Irlande, mais plus longtemps, elle eut tendance à se confondre avec une forme de nationalisme écossais.

Après le soulèvement de 1689, des soulèvements jacobites eurent lieu en 1715 et 1719. Mais ces soulèvements étaient bien loin de concerner toute l'Ecosse, pays divisé religieusement et politiquement.

Quant à  l'Irlande, elle n'avait rien à attendre d'un changement de monarque à Londres et elle ne bougea pas.

 

En 1745, le prétendant Charles-Edward Stuart, petit-fils de Jacques II, qui resterait célèbre sous le surnom de  Bonnie Prince Charlie (le beau prince Charlie) débarqua en Ecosse et souleva autour de lui une partie des clans écossais, une autre partie restant dans une prudente expectative ou rejoignant les forces gouvernementales.  Les vieilles fidélités jouèrent leur rôle : en 1692, les Campbell, partisans de Guillaume III,  avaient massacré les MacDonald. En 1745, les MacDonald furent parmi les plus fermes soutiens de Charles-Edward alors que les Campbell combattaient aux côtés des Anglais.

 

La tentative déboucha sur la défaite des insurgés à Culloden et une sévère répression anglaise, allant jusqu'à interdire le costume écossais, sauf pour ceux qui serviraient dans l'armée britannique...

L'interdiction fut levée en 1782 (entretemps, l'Ecosse avait bien changé).

Après l’échec du soulèvement,  le Prétendant reprit sa vie d'exil.

Les dernières images qu'on a de lui, bien loin de l'épisode romanesque du soulèvement de 1745, sont celles d'un vieux monsieur égoïste et alcoolique, après une existence de débauche, vivant en Italie  avec sa fille la duchesse d'Albany qui sacrifiait sa vie pour s'occuper de lui, et parcourant en carrosse le Corso de Rome pendant le Carnaval en tenant le milieu de l'avenue au lieu de rouler sur les côtés comme les autres voitures, en obligeant la foule à se rabattre sur son passage. Goethe, qui en fut témoin, y voyait une sorte d'illustration de sa royauté carnavalesque.

Les Ecossais étaient encore sensibles aux malheurs des Stuarts en exil et le poète Robert Burns (l'auteur entre autres de la chanson  Auld Lang Syne  qu'on connait en français sous le nom de Chant des adieux ou Ce n'est qu'un au-revoir, mes frères) chanta la tristesse de la vie de la duchesse d'Albany.

 Lorsqu'il mourut sans héritier en 1788, les droits du Prétendant passèrent à son frère, qui était cardinal et mourut à Rome en 1807.

Un monument funéraire fut élevé dans la Basilique Saint Pierre aux trois Stuart qui sont enterrés dans la crypte (le fils de Jacques II, James Francis Edward et les  deux fils de ce dernier, Charles-Edward  et le cardinal) par le célèbre sculpteur néo-classique Canova en 1819.  Le roi George IV contribua à l'érection du monument : les Stuarts ne donnaient plus de cauchemars aux monarques britanniques. Le monument est souvent orné de fleurs par des visiteurs sentimentaux, nostalgiques de la cause des Stuarts.

 

Aussi curieux que cela puisse paraître, les droits à la couronne britannique furent transmis au roi de Piémont-Sardaigne (appartenant à la famille de Savoie), plus proche parent des Stuarts, qui évidemment ne les revendiqua jamais, ni ses descendants ...

 Les prétentions des Stuarts disparurent réellement avec Charles-Edward Stuart, mais déjà plus personne ne les prenait au sérieux.

 

 

 

 

PERMANENCE DE LA SOCIETE ANGLAISE

 

 

 

Le  temps de la Restauration anglaise est une époque trépidante, riche en événements, qui aboutit à un moment politique fondateur du système politique britannique, la  Glorious Revolution une révolution qui comme on l’a dit n’est pas une coupure avec la société ou l’histoire d’avant, mais au contraire se fait avec l’accord de presque toute la société de l’époque : les Lords et les aristocrates emperruqués, les évêques et clergymen anglicans, les protestants dissidents, les bourgeois,  le bon peuple, et bien entendu, les nouveaux monarques, tout le monde applaudit et se congratule  (et espère tirer la couverture à soi).

C’est surtout une période où la société s’étale avec ses fastes, ses qualités et ses tares, de façon fascinante, où le libertin finit par céder place au gentleman.

La Restauration est aussi une grande époque de création culturelle. On retient particulièrement le théâtre de la Restauration qui  reflète la réalité sociale de l'époque - à sa manière bien entendu: Congreve, Wycherley, Vanbrugh, Shadwell, Aphra Behn, et bien d'autres , mais aussi des poètes comme Dryden (aussi homme de théâtre) des musiciens comme Purcell, des philosophes comme John Locke (et le vieil Hobbes qui meurt octogénaire en 1680), des architectes comme Sir Christopher Wren, des hommes de science comme Newton dont les premières recherches datent des années 1680.

 

Ce qui peut fasciner aussi, c’est que la permanence, disons la continuité de la société anglaise (ou britannique si on veut) fait que les personnages et le style de la Restauration (et de la période qui suit) n’ont pas complètement disparu, ne sont pas que des souvenirs historiques.

 

L’allure des grands personnages en perruque de la fin du  17ème siècle demeure  avec les magistrats notamment ceux qui, membres de la chambre des Lords, assistent à la cérémonie d’ouverture du Parlement qui reprend, comme d’autres circonstances de la vie publique britannique, des éléments  de diverses provenances historiques, fondus dans un ensemble où chaque période a apporté sa contribution.

Et lorsque le Lord Chancellor (ministre de la justice) arrive pour la cérémonie d’ouverture, ou lorsqu'il fléchit le genou devant la reine pour lui tendre le discurs du trône, on pourrait se croire reporté au moins trois siècles plus tôt.

 

 

_60126311_hi014705333-1

Cérémonie d'ouverture du Parlement 2012.

Kenneth Clark, Lord Chancellor dans le premier gouvernement Cameron, dans le cortège. C'est le Lord Chancellor qui, dans la cérémonie d’ouverture,  transporte dans un curieux sac à l’ancienne blasonné (qu'on voit ici) le discours que la reine va lire et qu’il lui remet en s’agenouillant devant elle. Le port de la perruque n'est pas une obligation pour le Lord Chancellor.

La cérémonie d'ouverture du Parlement permet de voir des costumes d'époques différentes (robes d'inspiration médiévale des Lords, uniformes 19ème siècle, tenues 17ème siècle des magistrats, jaquettes de cérémonie).

http://www.bbc.com/news/uk-18005894

 

 

_60118445_hi014704403-1

 Magistrats à la cérémonie d'ouverture du Parlement 2012.

http://www.bbc.com/news/uk-18005894

 

article-2321142-19AD9A19000005DC-792_964x1245

 Cérémonie d'ouverture du Parlement 2013.

http://www.dailymail.co.uk/news/article-2321142/Queens-Speech-Immigration-crackdown-boosts-business-help-pensioners-HS2-Prince-Charles-attends-Queens-Speech-time-17-years.html

 

 

Mais le souvenir de l’époque est présent aussi, et plus encore, dans la permanence  des familles et le rôle plus ou moins public qu’elles continuent à jouer.

Les descendants des enfants adultérins de Charles II  font partie de la haute société britannique actuelle. Leur nombre a été multiplié avec les générations successives.

Les titres donnés par Charles II à ses enfants sont toujours portés par les descendants de Nell  Gwynn,  de Louise de Kéroualle ou de Barbara Villiers, qui par leurs alliances avec d’autres familles nobles ont depuis acquis d’autres titres.

Les ducs de Saint-Albans (descendants de Nell Gwynn), de Grafton (descendants de Barbara Palmer), de Richmond et Lennox (descendants de  Louise de Kéroualle) et d’autres encore, sont des personnages de la vie britannique.

Ces aristocrates mènent, selon leur caractère, des vies retirées ou des vies plus voyantes. Jusqu’à il y a peu, ils étaient forcément associés à la vie politique puisque membres de droit de la chambre des Lords.

En 1999, lorsque le gouvernement de Tony Blair fit voter la réforme de la chambre des Lords qui limitait à 90 Pairs héréditaires le droit de siéger à la chambre, qui devait être composée majoritairement de "life Peers" ( Pairs à vie, non héréditaires), excluant la presque totalité des Lords par droit de succession, jusque là membres de droit,  les débats furent marqués par un incident.

Alors que le duc de Saint-Albans siégeait à sa place, son fils unique,  Charles Francis Topham de Vere Beauclerk, comte de  Burford (titre de courtoisie), qui assistait à la séance sans faire partie de la chambre des Lords,  assis sur les marches du trône selon un usage admis pour les enfants aînés des Pairs, et sans aucun droit bien entendu à exprimer son avis, se leva pour dire au président de la chambre (le Speaker) que le projet du gouvernement était une trahison des valeurs britanniques

Son intervention scandaleuse lui valut  une sanction sous la forme d’une interdiction à vie de remettre les pieds  dans les locaux du Parlement.

L’année suivante, peut-être pour provoquer une contestation quant à son interdiction d’entrer dans les locaux parlementaires, Charles Beauclerk fut candidat aux élections à la chambre des Communes (comme candidat d’un petit parti de droite) mais n’obtint que moins d'un pour cent des voix.

L’un des  centres d’intérêt  de  Charles Beauclerk  est de prouver que les pièces de Shakespeare ont été écrites par le comte d’Oxford, dont il estussi le descendant.

Au cours d’une conférence  au Canada sur ce sujet, il fit la connaissance d’une jeune actrice et chanteuse pop canadienne (intéressée par la conférence ou par le conférencier ?) Louise Ann Robey et ne tarda pas à l’épouser en 2001. Après avoir eu un enfant, ils divorcèrent. On peut trouver sur internet quelques photos de charme de cette actrice - plutôt jolie dans le style des années 90.  

 Charles Beauclerk  a écrit une biographie de son ancêtre Nell Gwynn, qui après tout est bien à l’origine de la grandeur (relative) de sa famille et de son rang dans l’aristocratie.

Le hasard des alliances familiales peut faire aussi que certaines personnalités descendent à double ou triple titre des maîtresses de Charles II :  ainsi Diana Spencer, princesse de Galles, était la descendante de  Henry Fitzroy, premier duc de Grafton et  de Charles Lennox, premier duc de Richmond, ainsi que d'une fille illégitime de Jacques II, Henrietta FitzJames, comtesse de Newcastle.

Si son fils William, comme c’est probable, devient roi d’Angleterre, il sera (et c’est plus curieux)  le premier roi d’Angleterre à descendre de Charles II.

L’épouse du Premier ministre David Cameron, Samantha,  est aussi la descendante de trois des enfants de Charles II, Charles Beauclerck, premier duc de Saint-Albans, Lady Charlotte Fitzroy et Lady Mary Tudor.

 

 

        .     

 

 ANNEXE : L'ORDRE D'ORANGE, FIDELITE  ET PROVOCATION

 

 

 

Un autre aspect de l’époque que nous avons traitée – même si au sens strict, nous ne sommes plus vraiment dans la période de la Restauration (règne de Charles II et Jacques II) mais dans celle qui suit, le règne de Guillaume III, qui survit de nos jours est la trace laissée dans les mémoires - et aussi dans la réalité sociale du pays - en Irlande du nord par la victoire des Protestants.

 

Dans les mémoires mais aussi dans les actes,  puisque tous les ans, le 12 juillet, les Protestants membres des loges orangistes commémorent la victoire de la Boyne et narguent les Catholiques qui ne manquent pas de riposter, risquant de remettre en cause le délicat équilibre atteint depuis la fin des années 90 qui a mis fin à une situation de quasi guerre civile en Ulster.

 

L’Ulster est cette province nord-est de l’Irlande qui est restée une partie du Royaume-Uni lors de l’autonomie du reste de l’Irlande en 1922, puis de la proclamation de la république d’Irlande en 1949,  parce que les Protestants (venus d’Angleterre ou d’Ecosse au 17ème siècle en général) y sont majoritaires.

 

A la fin du 18ème siècle, l’Irlande fut secouée par une insurrection anti-anglaise.

 

Les Irlandais catholiques – et quelques Protestants qui se considéraient avant tout comme des Irlandais -  essayèrent de secouer la domination anglaise. des troubles eurent lieu dès les années 1793-94 et culminèrent dans les années suivantes par l'insurrection des "Irlandais-Unis".

Les insurgés obtinrent  l’aide de la France du Directoire (pourtant peu catholique) qui envoya  par deux fois une expédition à leur secours. L’insurrection fut vaincue avec une grande brutalité par les forces anglaises et les secours français furent capturés ou rejetés à la mer.

 Lors des troubles, en Ulster, un propriétaire protestant,  menacé par les insurgés, appela à son aide ses « frères » membres de sa loge maçonnique. Ceux-ci avaient peut-être leurs propres difficultés et ne vinrent pas.

  Ce propriétaire eut alors l’idée d’une sorte de franc-maçonnerie qui se consacrerait à la défense des intérêts et de la domination (ascendancy) protestante en Irlande : l’Ordre d’Orange était né (en 1795), ainsi appelé en hommage à Guillaume d’Orange – pourtant un homme bien plus tolérant que ses futurs admirateurs d’Ulster. Il est constitué de loges selon le modèle maçonnique.

 

Parmi les rituels dont se dota l’Ordre, il y a la commémoration de la bataille de la Boyne le 12 juillet  (en fait la bataille eut lieu le 1er juillet 1690, soit le 11 dans le calendrier grégorien), connue localement comme "the Twelfth" (le Douze).

 

Pour leurs parades, les membre de l’Ordre d’Orange (de son nom officiel, Loyal Orange Institution, les membres sont souvent  appelés Orangemen)  ont adopté, pour les plus notables d’entre eux, une tenue destinée à marquer leur amour indéfectible  de la Grande-Bretagne :  costume sombre, chapeau melon  et parapluie, l’étole orange de l’Ordre autour du cou.

Les défilés de l'Ordre comportent aussi des musiques en uniformes de fantaisie, souvent inspirés de l'armée britannique. L'Ordre a aussi des mouvements de jeunesse, des branches féminines.

Musique en tête, bannières de l’Ordre d’Orange, drapeau de l'Ulster et drapeau britannique déployés, les membres de l'Ordre  marchent en longeant les quartiers catholiques à Londonderry – haut lieu de la résistance protestante en 1690, que les catholiques appellent  bien entendu Derry,  refusant le London –  à Portadown  ou à Belfast,  suscitant la colère et les ripostes des militants catholiques.

L'Ordre a évidemment des justifications philanthropiques envers ses adhérents,  c'est aussi une société d'entraide, ouverte aux seuls Protestants.

 Il existe aussi une organisation, avec des degrés calqués sur la franc-maçonnerie, la Royal Black Institution, qui constitue une sorte de niveau supérieur de l'Ordre d'Orange (sans être lié à lui formellement - mais on ne peut devenir membre de la Royal Black Institution que si on est déjà orangiste).

  Qui a tort ou raison dans cette  querelle qui parait d’un autre temps ?

 Ici  ce sont les Protestants qui jouent les provocateurs et leur cérémonie a bien pour but de commémorer une victoire consacrant la défaite et  l’humiliation durable de leurs voisins catholiques.

 

MI-Orange-Order-march

 Un des défilés de l'Ordre d'Orange pour le 12 juillet.

 http://www.irishcentral.com

 

 

 L'Ordre d'Orange existe aussi en Angleterre proprement dite et en Ecosse (dans les Lowlands), où, sans surprise, l'Ordre s'est opposé au "oui" lors du referendum sur l'indépendance en 2014.

Il existe dans plusieurs pays du Commonwealth -  y compris en Afrique -   et notamment au Canada où, un peu comme en Ulster, il se présente comme avant tout loyaliste envers la monarchie (puisque le monarque britannique est aussi monarque du Canada) et prétend défendre à la fois les valeurs protestantes et le maintien de l'unité canadienne en face du catholicisme et du séparatisme québecois.

 

 NB : On ne confondra pas l'Ordre d'Orange, organisation de masse essentiellement britannique et les ordres de chevalerie (en fait des décorations) relevant du  royaume des Pays-Bas, l 'Ordre d'Orange-Nassau et l'Ordre de la Maison d'Orange (les rubans de ces ordres de chevalerie sont orange, blanc et bleu ou orange).

 

 

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Le comte Lanza vous salue bien
Publicité
Archives
Publicité