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Le comte Lanza vous salue bien
22 février 2013

IDENTITE MONEGASQUE

 

 

IDENTITE MONEGASQUE
 

( les notes du texte sont appelées par une * et sont en caractères rouges  avec un début de phrase en fin de ligne pour les distinguer du corps du texte)


 





Il semble possible d’aborder l’identité d’une population donnée au moyen des manifestations ou des signes dans lesquels on peut penser qu’elle se reconnaît.
Lorsque cette population constitue un Etat ou une Nation (les deux mots sont ici presque équivalents), une de ces manifestations est l’hymne national.

La nation est un peuple doté d’une conscience plus claire de son identité ou de sa singularité, fondée sur une histoire commune et des caractéristiques communes .
L’idée issue ou en tous cas popularisée comme une nouveauté par la révolution française, qu’un peuple devient une nation lorsque ceux qui le composent exercent collectivement la souveraineté, n’est pas indispensable à la définition de la nation : il y a des nations sans souveraineté et donc sans état, qui sont pourtant des nations :

De nombreux pays qui ont accédé à l’indépendance constituaient auparavant des nations sans état, à qui il serait étrange de dénier la qualité de nation à leur peuple parce qu’il n’exerçait pas de souveraineté*.

                                                                               *Dans le cas de certains pays anciennement colonisés, il est probable toutefois que la population des territoires ne se concevait pas clairement comme nation avant l’indépendance. On peut dire en ce cas que l’Etat nouvellement créé précède la Nation et s’efforce de créer un sentiment national .
On se souvient d’ailleurs de la formule de Cavour en Italie après la proclamation du Royaume d’Italie en 1861, réunissant presque tous les territoires composant l’Italie actuelle (sauf la Vénétie et Rome qui seront réunis en 1866 et 1870) : « L’Italie est faite, il reste à faire les italiens » (on peut comprendre qu’il restait à créer un sentiment national italien).



Par rapport à la notion de peuple* (qui indique au départ un peuplement sur un territoire déterminé), le concept de nation apporte un degré supplémentaire en termes de conscience de soi, mais pas fondamentalement différent.

                                                                               *Le mot « peuple » n’est pas pris ici au sens juridique de corps de citoyens exerçant la souveraineté –ou au nom de qui s’exerce la souveraineté par des dirigeants et représentants élus (à peu près équivalent à Nation dans l’acception post-révolutionnaire française) mais au sens de population caractérisée par une identité commune.
Aux USA, on utilise l’expression « the people » dans le sens de corps politique de citoyens. Ainsi, les procès dans lesquels un individu est poursuivi par l’Etat ( par exemple accusé de crime),  sont désignés par l’expression  «  The People vs Mr. X».


Une fois constitué en Etat, un peuple marque la différence entre ceux qui le composent et ceux qui, sans en faire partie, résident dans les limites géographiques du pays, au moyen la de la reconnaissance de la nationalité (ou de la citoyenneté).
S’agissant d’une population comme Monaco, celle-ci est à la fois un peuple et une Nation (définies  par la conscience de son identité ou de son altérité par rapport à ceux qui l’entourent), elle dispose d’un Etat reconnu (avec son gouvernement, ses frontières).

 




Comment s’est constitué le peuple monégasque

 




La constitution du « peuple monégasque » aussi petit soit-il, est inséparable de la constitution de l’état monégasque ou de son prédécesseur historique, la seigneurie de Monaco et de son évolution.

En effet, la constitution, à Monaco d’une population distincte de ses voisins immédiats trouve son origine dans la décision, prise à la fin du XIIème siècle, par l’empereur du Saint Empire romain germanique, d’attribuer à la commune de Gênes le site de Monaco pour en faire une forteresse.
L’empereur germanique était à l’époque le suzerain de la commune de Gênes et du comte de Provence, dont les possessions comprenaient Monaco. Que le comte de Provence ait bien ou mal pris cet ordre, le transfert de souveraineté se fit.
Une garnison génoise fut installée à Monaco et sans doute quelques familles génoises.
Puis en 1297, date bien connue à laquelle on fait remonter, sans doute un peu abusivement, le début de la dynastie des Grimaldi, un membre de cette famille et quelques soldats, déguisés en moines, s’emparent de Monaco. Cette prise se place dans le cadre de luttes intestines entre grandes familles génoises. Il n’est donc pas encore question de fonder une seigneurie indépendante. Les génois reprendront Monaco pour un moment avant que les Grimaldi restent en possession de la forteresse.
A la fin, définitivement éliminés du jeu politique génois, la branche des Grimaldi de Monaco*abandonne toute prétention à participer au pouvoir à Gênes et se consacre à Monaco dont elle fait une seigneurie indépendante, s’alliant tour à tour avec ceux qui lui paraissent les plus aptes à offrir une protection (notamment le roi de France ou le roi d’Espagne).
Quant aux génois, considérant que la forteresse continue de leur appartenir, ils essaient sporadiquement de la reprendre jusqu’au XVIème siècle.

                                                                                                                                                       *ll y a eu d’autres branches de la même famille installées en Provence de l’Est (une branche à Antibes, une branche à Bueil dans le pays de Nice, qui a joué un rôle lors du rattachement du pays de Nice au duché de Savoie).

Pour accroitre leur population, les Grimaldi font venir des familles de la région de Vintimille ; c’est ainsi qu’apparait la langue qui devient dominante dans la seigneurie et future principauté, le dialecte de Vintimille*

                                                                                                                                                    *En italien, on nomme intemelio (intémélien) une variété du ligure qui se parle de Vintimille à Sanremo. Son parler le plus diffusé est le Ventimigliese, celui de Vintimille (en dialecte, u ventemigliusu) (Wikipedia)


C’est cette langue, augmentée sans doute d’éléments linguistiques occitans, qui caractérise longtemps la population de Monaco ; elle est suffisamment distincte des dialectes nissarts qu’on parle dans les commune environnant Monaco* pour maintenir le sentiment identitaire, comme le maintient de son côté  le statut  de Monaco, seigneurie autonome.

                                                                                                                                                          *Les seigneurs (plus tard princes) de Monaco agrandissent ensuite leur territoire en terre provençale (puisque ces acquisitions sont antérieures de peu à la séparation du comté de Nice d’avec la Provence) : ils acquièrent Menton et Roquebrune. Ces territoires, seront plusieurs siècles monégasques jusqu »au XIXème siècle, où, en désaccord avec le Prince siècle sur des questions fiscales, ils se séparent de fait de Monaco et sont administrés par le Piémont-Sardaigne, puis optent pour le rattachement à la France qui a lieu en 1861, moyennant un dédommagement de quatre millions de francs-or versés par la France au Prince.


Que ce ne soit pas un état pleinement indépendant n’a guère d’importance car ce qui compte, c’est le rattachement immédiat.
Que Monaco soit sous la protection du Roi de France ou du Roi d’Espagne, ne transforme pas ses habitants en Français ou en Espagnols. Quant au territoire dans lequel Monaco est enclavé, il relève, jusqu’aux événements de la Révolution française, du duc de Savoie* devenu ensuite Roi de Piémont-Sardaigne : les habitants de Monaco savaient bien qu’ils n’avaient pas de lien politique avec cet état voisin et ne se confondaient pas avec ses habitants.

                                                                                                                                                   *A partir de 1388, date à laquelle le pays de Nice se sépare de la Provence, au cours du conflit entraîné par la succession de la reine Jeanne, comtesse de Provence et reine de Naples, assassinée par son neveu, Charles de Duras (Durrazzo), qui se proclame roi de Naples et comte de Provence et combat l’héritier désigné par le testament de Jeanne, Louis d’Anjou. La Provence ayant fini par se rallier à Louis d’Anjou (candidat soutenu principalement par Marseille), Nice refuse seule de suivre le mouvement et se donne, par décision des organes représentatifs des habitants, au comte (puis duc) de Savoie. Cette « dédition » coupe durablement le comté de Nice (comme on l’appellera depuis ce moment), de la Provence .

 


Lorsque se posa la question de savoir qui était monégasque, cette reconnaissance n’a pas du poser de difficultés. En effet la qualité de monégasque est fondée depuis un temps immémorial, sur le droit du sang.
Sont donc monégasques les descendants de ceux qui ont toujours habité dans les limites de la principauté de sorte que lorsque celle-ci s’est constituée en état moderne, le critère d’appartenance n’était pas discutable.
S’y agrègent ensuite, par un choix délibéré et par l’acceptation par les autorités de la demande présentée, les personnes ayant sollicité la naturalisation.

Certes Monaco fut annexée à la France pendant la période révolutionnaire et l’empire napoléonien. Mais cette annexion fut de trop courte durée pour influer sur le sentiment des monégasques de se considérer comme un peuple particulier.

 




Quand la République (française) rêvait d’imposer ses bienfaits au Rocher

 




Il est à noter que de temps en temps, lorsqu’ils parlent de Monaco, les médias français, avec une étonnante bonne conscience, évoquent les propos échangés entre un responsable de la Résistance française, devenu commissaire de la République en Provence-Côte d’Azur à la libération, en août 1944, le célèbre Raymond Aubrac*, et le général de Gaulle.

                                                                                              *Raymond Aubrac (c’est son pseudonyme de résistant qu’il a conservé), mort en 2012, responsable de la Résistance, fut assez brièvement commissaire de la République en Provence Côte d’Azur après la libération. Dès le début de 1945, il fut remplacé à son poste, semble-t-il à la suite d’interventions de Gaston Defferre, qui  lui reprochait une attitude trop favorable au parti communiste à Marseille. Son épouse, Lucie Aubrac, fut aussi une résistante célèbre (décédée en 2007). Par la suite R . Aubrac, proche de positions communisantes mais désapprouvant le communisme soviétique, se consacra à l’aide au Tiers-Monde. En 2009, R. Aubrac et Stéphane Hessel (futur auteur de « Indignez-vous ») ont lancé un appel à rester fidèles aux valeurs morales et sociales de la Résistance. Son parcours montre que sa conception du monde devait difficilement intégrer l’existence de la principauté de Monaco.

 


Selon ce que raconte Aubrac lui-même, celui- ci avait proposé au général de Gaulle l’annexion de Monaco par la France, en lui demandant son feu-vert. Le général aurait répondu : « Si vous l’aviez-fait sans me le demander, je vous aurais approuvé. Si vous me demandez mon autorisation, je ne peux pas vous la donner ».
Cette anecdote est rappelée par les journalistes avec complaisance, comme pour montrer que le sort de Monaco n’a pas tenu à grand-chose et que sa survie résulte de la bonne volonté des dirigeants français.

L’annexion aurait été une violation flagrante, sauf à la justifier par des raisons spécieuses, des textes définissant à l’époque les rapports politiques avec la France (traité du 27 juillet 1918 et article 436 du traité de Versailles du 18 juin 1919)*

                                                                                  *Remplacé par le traité de 2002, voir en annexe. Monaco est aujourd’hui un état  membre de l’ONU, qui confie sa défense et sa protection à la France. Les deux pays s’engagent à suivre une politique favorable aux intérêts fondamentaux de chacun.

 

Ces textes instituaient entre les deux États un régime contractuel bilatéral et réciproque. C'est ainsi qu'en contrepartie de l'engagement de la France de défendre l'indépendance, ainsi que la souveraineté de la principauté et l'intégrité de son territoire, le gouvernement monégasque s'engageait à exercer ses droits en conformité avec les intérêts français.

A aucun moment ceux qui rappellent avec complaisance cette anecdote, ne se demandent si l’annexion correspondait aux vœux ou aux intérêts des habitants, ceux-ci étant jugés sans doute quantité négligeable.


On ne s’aperçoit même pas que la France, en annexant Monaco, aurait imité la politique de l’Allemagne nazie, pourtant repoussoir absolu*.  

                                                                                     *S’agissait-il de punir Monaco de son attitude durant la guerre ? Monaco avait fait, à son échelle, ce que la France avait fait au sien. Plus probablement il s’agissait d’une forme d’impérialisme idéologique. Si l’annexion avait eu lieu, y aurait-il eu un référendum pour l’avaliser ? Dans ce domaine, les référendums ont une grande tendance à consacrer les faits accomplis. 

Cette anecdote, et son rappel périodique par des journalistes hexagonaux, est seulement symbolique d’une forme de jalousie de certains français à l’égard de Monaco, qui peut le cas échéant se transformer en attitude haineuse.
Les journalistes feraient mieux de se demander, même par plaisanterie, si beaucoup de français n’auraient pas, au contraire, préféré devenir monégasques…





L’hymne dans la version de Louis Notari :  les monégasques n’ont peur de düsciün*                                                                                          

  *Voir note sur ce mot.




L’hymne dont s’est doté une nation permet de comprendre les valeurs dont elle se réclame et l’idée qu’elle se fait de son identité.
Cela est d’autant plus vrai lorsque l’hymne a été écrit délibérément pour servir d’hymne national, ce qui n’est pas le cas d’un chant que l’histoire a transformé en hymne mais qui au départ pouvait avoir un tout autre sens (par exemple, la Marseillaise n’est pas au départ l’hymne national de la France, mais un chant de marche composés pour l’armée du Rhin).  

Depuis le XIXème siècle, il existait un hymne monégasque, avec des paroles en français.
S’agissant de la musique, celle-ci fut modifiée au début du XXème siècle.
Mais le site du Palais princier indique :
« C'est enfin le poète monégasque Louis Notari (1879-1961)* qui écrivit en 1931 une version en langue monégasque. Elle suit mot à mot le rythme musical et reprend le trio. Ce texte, rédigé dans l'élégante simplicité de l'idiome local est maintenant définitivement adopté et chanté dans diverses manifestations ».

                                                                 *Louis Notari , issu d’une vieille famille monégasque fit des études d’ingénieur ( à Turin) et travailla à Monaco comme directeur des travaux publics (on lui doit le jardin exotique) puis fut nommé conseiller d’Etat par le prince et fut aussi adjoint au maire de Monaco après sa retraite ; parallèlement à sa carrière, il oeuvra pour le maintien de la langue et des traditions monégasques.


La musique de cet hymne présente un caractère très vif et débute presque abruptement sur un rythme emporté. C’est sur cette musique joyeuse que se chantent les paroles en langue monégasque de L. Notari.
On peut penser que l’auteur des paroles a voulu, délibérément, exprimer l’identité monégasque dans sa composition. En 1931, cette identité était fixée depuis suffisamment de temps pour que dans sa composition, Louis Notari, essaye d’en définir les éléments.


Inu Munegascu 

(version du site du palais princier)

Oilà cü ne toca ! 
Oilà cü ne garda ! 
Fò che cadün sace ben aiço d'aiçì

Despœi tugiù sciü d'u nostru paise 
Se ride au ventu u meme pavayun 
Despœi tugiù a curù russa e gianca 
E stà r'emblema d'a nostra libertà ! 
Grandi e piciui r'an tugiù respetà !

Amu avüu sempre r'a meme tradiçiun ; 
Amu avüu sempre r'a meme religiun ; 
Amu avüu per u nostru unù 
I meme Principi tugiù 
E düsciün nun purà ne fa sciangià 
Tantu ch'au cielu u suriyu lüjerà ; 
Diu n'agiüterà 
E mai düsciün nun purà ne fa scangià Düsciün

Nun sëmu pa gaïre, 
Ma defendemu tüti a nostra tradiçiun ; 
Nun sëmu pa forti, 
Ma se Diu vœ n'agiüterà !

Oilà cü ne toca ! 
Oilà cü ne garda ! 
Fo che cadün sace ben ailo d'ailì

 


Hymne Monégasque


Ohé, vous qui voisinez !
Ohé, vous qui nous regardez !

Il importe que chacun retienne bien ceci : 

Depuis toujours, le même pavillon
Flotte joyeusement au vent de notre Pays
Depuis toujours les couleurs rouge et blanc
Constituent le symbole de notre liberté
Grands et Petits l'ont toujours respecté


Nous avons perpétué les mêmes traditions
Nous célébrons la même religion
Nous avons l'honneur
D'avoir toujours eu les mêmes Princes
Et personne ne pourra nous faire changer
Tant que le soleil brillera dans le ciel
Dieu nous aidera
Et jamais personne ne pourra nous faire changer Personne

 


Nous ne sommes pas bien nombreux
Mais nous veillons tous à la défense de notre identité
Nous ne sommes pas très puissants
Mais, s'il le veut, Dieu nous aidera.


Ohé, vous qui voisinez !
Ohé, vous qui nous regardez !
Que chacun prenne bien conscience de cela.



Que nous apprend cet hymne dans la version définitive actuellement utilisée, sur la façon dont les monégasques se voient en tant que peuple ?
D’abord, la version chantée de Louis Notari est en monégasque, une langue forcément parlée par peu de personnes

Certes, au fil du temps, la langue parlée à Monaco est devenue le français (après 1860, Monaco est enclavée dans un territoire entièrement français, même si ce territoire lui-même n’est pas de tradition linguistique française mais nissarde*

                                                                             *Inutile d’entrer dans la polémique linguistique parfois assortie de considérations politiques qui oppose ceux qui considèrent le nissart comme une variante de l’occitan (ce qui semble être l’opinion commune) et ceux qui en font une langue à part, ou un dialecte plus proche du piémontais que de l’occitan..

 

et que l’italien y a longtemps été langue officielle *

                                                                                *Un seul exemple : avant 1860 (rattachement de Nice et la Savoie à la France par le traité de Turin, confirmé par plébiscite), les lettres provenant de Nice portaient le cachet « Nizza di mare » ou « Nizza marittima ». Mais en nissart, le nom est Nissa. Les conditions du plébiscite, on le sait, ont été contestées et un certain nombre de niçois sont toujours d’accord avec la phrase du niçois Garibaldi : « Nice est française comme je suis tartare ».


La langue parlée par les monégasques de naissance, ceux qui sont monégasques depuis des générations, reste le dialecte importé par les familles de Vintimille. C’est dans ce dialecte que Louis Notari choisit de s’exprimer, pour rester au plus près de l’identité ancienne des monégasques, qui parlent français dans la vie de tous les jours, mais continuent à se sentir les descendants des familles installées à Monaco au cours du Moyen-Age.

Ainsi ce choix accroit les différences entre les monégasques et les populations françaises (occitano-provençales ou nissardes à l’origine mais devenues bon gré mal gré d’expression française) qui l’entourent, plus que la première version de l’hymne qui était en français.

Un tel choix est comparable à l’esprit dans lequel un autre pays que l’opinion française avait tendance à « annexer » culturellement, le Luxembourg*

                                                                          *L’existence, aux frontières de la France, de petits pays qui sont généralement prospères - souvent en raison de leur législation fiscale avantageuse- est pour certains français, une cause d’agacement. L’annexion culturelle est un substitut à l’annexion pure et simple qui n’est plus dans le domaine du possible, pour les émules de R. Aubrac.

, a évolué récemment, paraissant rechercher ce qui pouvait le distinguer de son voisin français. Ainsi le Luxembourg a remis en honneur sa langue d’origine germanique, reconnue comme langue nationale en 1984 (donc assez récemment) et aujourd’hui, sur les pièces en euros qui circulent, on peut voir l’inscription Lëtzebuerg  et non Luxembourg*. 


                                                                        *Au Luxembourg, le luxembourgeois (Lëtzebuergesch) est la langue nationale depuis la loi du 24 février 1984. Le français, l'allemand et le luxembourgeois sont toutes les trois langues administratives.



La première chose qu’on remarque dans la version de L. Notari (texte en monégasque dont la traduction française s’efforce de rester proche ce qui explique sans doute des maladresses de style) c’est l’insistance sur l’idée de permanence.
Les mots « tugiù «  et son synonyme  « sempre «  (toujours) sont employés plusieurs fois, et la phrase « E mai düsciün nun pura ne fa scangia «  résume l’idée. Il existe une personnalité monégasque qui depuis toujours, ou en tous cas depuis extrêmement longtemps, est définie par les mêmes éléments : le même drapeau, la même dynastie, les mêmes traditions, la même religion.

Cette personnalité ne changera jamais. D’une certaine façon, l’hymne monégasque fait l’éloge de la permanence et dit que les monégasques ne sont pas soumis aux changements de l’histoire. Il n’y a pas de rupture entre les générations, l’histoire n’a pas de prise sur eux, ils sont bien toujours les mêmes monégasques depuis des siècles.


L’idée d’une marche de l’histoire qui constituerait un progrès est donc, indirectement, niée. Le progrès peut apporter des améliorations favorables dans la vie quotidienne (qu’aucun monégasque ne refuse bien entendu) mais il n’est pas une fin en soi puisque la fin en soi est de rester fidèle à une identité pluriséculaire.


A partir de là, l’hymne développe les éléments de l’identité : nos princes, notre pavillon rouge et blanc, symbole de notre liberté (sans qu’on puisse savoir s’il s’agit de la liberté individuelle ou de la liberté d’exister comme état indépendant –sans doute la deuxième version est la bonne, mais elle n’exclut pas la première : c’est dans la fidélité à leur prince que les monégasques trouvent leur liberté).


Les traditions et la religion, ces éléments constitutifs d’une identité dans la longue durée, sont évoqués également
Une fugace évocation fixe le cadre géographique et climatique de la principauté : le pavillon flotte joyeusement au vent « de notre pays » ;  le texte monégasque dit « se ride au ventu » avec les connotations heureuses du mot « ride ».  


Tous les mots évoquent un climat favorable ; le mot soleil est absent de la strophe mais est presque suggéré avec l’idée d’un vent léger qui tempère la chaleur. La strophe suivante (en monégasque aussi bien qu’en français) évoquera le soleil :
Tant que le soleil brillera dans le ciel
Dieu nous aidera

Le texte est bien conscient que la population de Monaco est petite.
Nous ne sommes pas bien nombreux
(…)
 Nous ne sommes pas très puissants
Dès lors, pour assurer son existence et sa permanence, il reste l’aide de Dieu, dont on ne doute pas, comme on l’a vu (Tant que le soleil brillera dans le ciel …).
Invoquer Dieu dans l’hymne national est aussi une façon de marquer son identité puisqu’à Monaco la religion catholique est religion d’Etat (un des rares pays toujours dans ce cas).



Le texte insiste sur le souci très conscient pour les monégasques de défendre leur identité :
Nun sëmu pa gaïre,
Ma defendemu tüti a nostra tradiçiun ;
Nun sëmu pa forti,
Ma se Diu vœ n'agiüterà !


Ce souci est plus visible encore dans la traduction française , où


 Ma defendemu tüti a nostra tradiçiun

est traduit par
Mais nous veillons tous à la défense de notre identité


Il est rare qu’un hymne national évoque explicitement l’identité d’un peuple, c’est pourtant le cas ici. On peut vraiment parler d’hymne identitaire, où les monégasques se définissent par leur tradition, leur religion, la permanence de leurs institutions ( toujours les mêmes princes, toujours le même « pavillon » aux couleurs rouge et blanche) pour aboutir à une affirmation, sorte de cri de cœur ; que rien ou personne ne les fera jamais changer, avec la répétition de « personne » en fin de vers (Düsciün).


E mai düsciün nun purà ne fa scangià Düsciün*

                                                                             *Une des constatations amusantes qu’on peut faire est que le mot düsciün est l’équivalent monégasque du provençalo-marseillais degun , ce qui semble montrer une origine commune. Selon le wikidictionnaire, Degun (considéré comme du français régional de Provence), vient « du latin nec unus via le bas-latin *negus, le roman degun puis le provençal degun. L'étymon latin donne ninguno en espagnol, nessuno en italien, nenhum en portugais, etc. Le changement du /n-/ en /d-/ a lieu par dissimilation en provençal » et d’autres langues, mais la source ne cite pas les dialectes apparentés au monégasque, qui sont sans doute dans le même cas.
Le « ü » se prononce u, le u sans tréma se prononce ou, le « sci » se prononce tch, donc le mot doit se prononcer « dutchun ».


Enfin l’hymne s’ouvre et se termine par une sorte d’avertissement « amical » aux voisins, sur la détermination des monégasques à rester fidèles à eux-mêmes, donc à leur liberté (au sens ici d’indépendance) et leurs institutions, avec quelques changements dans l’expression, visiblement de tonalité populaire, qui termine l’avertissement :


aiço d'aiçì, dans la première strophe,
ailo d'ailì,  dans la dernière
Oilà cü ne toca !
Oilà cü ne garda !
Fo che cadün sace ben ailo d'ailì
Ohé, vous qui voisinez !
Ohé, vous qui nous regardez
Que chacun retienne bien ceci
 
L’avertissement en 1931, date du texte de L. Notari, peut s’adresser à tous ceux qui voudraient annexer Monaco, parmi ses voisins. Le régime de Mussolini considérait Monaco comme terre italienne à récupérer et même la France, protectrice théorique de l’existence de Monaco, n’était pas un voisin inoffensif, comme allait le montrer quelques années après, l’idée de R. Aubrac d’annexer (pour son bien, évidemment) Monaco à la vertueuse République française.
Mais Louis Notari avait été bon prophète :


Nous ne sommes pas très puissants
Mais, s'il le veut, Dieu nous aidera.


Et  Monaco en tant qu’état indépendant est toujours là !


Finalement, l’hymne monégasque présente deux notions qui se superposent au point de se confondre mais qu’il faut quand même essayer de distinguer :
La première est de définir l’identité monégasque par la langue utilisée qui est celle restée en usage chez les descendants des premières familles, par des éléments institutionnels ou issus de l’histoire et n’ayant jamais varié  : la dynastie des Grimaldi (toujours les mêmes princes) le drapeau, nos traditions (cette notion n’est pas développées mais on se doute qu’il existe de nombreuses traditions du peuple monégasque  dont certaines de nature religieuse) enfin, trait d’union avec les traditions, la religion*(Nous célébrons la même religion).

                                                                                        *Par exemple le culte de Sainte-Dévote est à la fois un élément de tradition et une manifestation religieuse.


La deuxième notion est celle d’une affirmation de permanence ou si on veut d’éternité. L’identité monégasque ainsi décrite est immuable, elle apporte le sentiment de la participation à quelque chose qui ne change pas. En même temps, cette identité immuable est perçue comme demandant un effort, une défense consciente contre les dangers qui pourraient la menacer.
En gros, l’identité monégasque se définit par l’attachement à des valeurs ( par exemple l’attachement à la dynastie), mais ces valeurs sont présentées comme immuables dans le temps et c’est leur permanence qui fait que les monégasques y sont attachés plus peut-être que l’intérêt propre qu’elles présentent.


Le sentiment d’identité des monégasques se vit sur ce mode particulier qui est la résistance au changement. On peut dire que c’est une évidence, l’identité est ce qui ne change pas. Sauf à titre de paradoxe, personne ne peut dire « notre identité, c’est d’en changer tout le temps » (ou de ne pas en avoir). Mais l’identité suppose ici une résistance délibérée au changement, un refus conscient du changement, ce qui donne à l’hymne une tonalité assez rare*

                                                                     *Il suffit pour mieux comprendre cette idée, de penser à la notion de métissage, tellement à la mode. Le métissage est par définition quelque chose de nouveau qui s’ajoute à quelque chose de déjà là. La conception monégasque est aux antipodes de l’idée de métissage, sauf erreur d’interprétation. Cela n’empêche pas la société monégasque d’être assez cosmopolite (voir encadré). Ce cosmopolitisme est socialement plutôt homogène et démontre que la réalité d’une société et l’identité de la nation sont deux choses différentes, éventuellement compatibles si les conditions sont réunies..


C’est ce sentiment de fidélité à une identité forgée par la longue durée que L. Notari a exprimé, en tenant pour admis qu’il caractérise bien le sentiment de la majorité de ses compatriotes.
On peut rapprocher ce sentiment de celui qui est exprimé par la devise d’un autre petit peuple dont il a été question plus haut, puisque la devise nationale du Luxembourg est :  


  Mir wëlle bleiwe wat mir sinn
 Nous voulons demeurer ce que nous sommes

 

prince monaco


 
Le Prince et la princesse mettent traditionnellement le feu à une barque la veille de la fête de Sainte Dévote (site Palais princier de Monaco)..
 Sainte Dévote serait née en 283, à Quercio lieu-dit sur la commune de Lucciana en Corse, et aurait été martyrisée sur l'île en l’an 312. Suivant la tradition, la barque qui devait transporter son corps vers l'Afrique fut prise dans la tempête. Ayant été guidée par une colombe vers la rive européenne, elle aurait abordé à Monaco, où existait un port d'escale à l'époque romaine.
Au Moyen Âge, les reliques de la sainte auraient été volées, puis emportées en barque par des malfaiteurs qui furent finalement rejoints et dont on brûla l'embarcation. Ce serait l'origine de la cérémonie qui se célèbre, le 26 janvier de chaque année dans la Principauté monégasque dont sainte Dévote est la patronne, et au cours de laquelle, on brûle une barque sur le port, non loin de l'église votive située dans le vallon des Gaumates et le quartier de La Condamine. Le lendemain, 27 janvier (jour de la fête de sainte Dévote), a lieu une imposante procession.



Daghe mùnegu




Les amateurs de football connaissent sans doute la devise des supporters monégasques, Daghe Mùnegu, qui correspondrait en italien à Forza Monaco (en français c’est peu traduisible) .


Quand on entre par la route dans la principauté, si on fait attention, on voit la plaque en français annonçant Principauté de Monaco, doublée par la plaque annonçant Principàtu de Mùnegu.

 

 

 

 

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Panneau à l'entrée de Monaco.

Illustration d'un article de Riviera 24.it (2017) qui s'interroge sur la possibilité d'introduire des panneaux bilingues à Tende et Brigue, communes anciennement italiennes annexées par la France en 1947, à l'exemple de ce qui a été décidé à Fiume/Rijeka en Croatie, et cite Monaco comme exemple de bilinguisme français/langue locale.

Bilinguismo, Briga e Tenda guardano all’iniziativa di Fiume

https://www.riviera24.it/2017/11/bilinguismo-briga-e-tenda-guardano-alliniziativa-di-fiume-270128/

 



Cette « visibilité » du monégasque n’est pas un phénomène ancien, mais marque au contraire une résurgence. Le choix de la version monégasque de Louis Notari pour l’interprétation de l’hymne national est un symbole de cette importance accrue donnée au monégasque, bien que la langue officielle soit le français.

Dans les années 1970, le monégasque était menacé d’extinction. Une politique volontariste a été menée pour sauver la langue, à laquelle est associée l’action du chanoine Georges Franzi *, qui avec d’autres, plaida auprès du Prince pour un apprentissage scolaire du monégasque.

                                                        *Le chanoine Franzi, d’une vieille famille monégasque, participa activement à l’œuvre entreprise par Louis Notari et d’autres pour la sauvegarde de la langue et des traditions et notamment pour que la langue soit enseignée aux enfants dans les écoles . A partir de 1976, le Prince Rainier  le chargea de cet enseignement . Il travailla à mettre au point  « U me primu libru  » et  « A piciuna gramatica », les premiers manuels scolaires en langue monégasque. Il est mort en 1997.


Son introduction dans les écoles, décidée par le Prince Rainier III à partir de 1976, semble lui avoir donné un second souffle. En effet, à partir du CE2 jusqu'à la 5ème au collège, (depuis 1998) l'apprentissage de la langue monégasque est obligatoire. À partir de la 4ème jusqu'en terminale c'est au choix de l'élève de continuer ou non. Le monégasque est accepté en option au baccalauréat au lycée de Monaco.
La réintroduction et l’utilisation du ligure monégasque dans la vie courante traduisent la volonté d’affirmation de l’identité de Monaco qui s’appuie notamment sur le Comité des Traditions Monégasques, qui a obtenu des aménagements linguistiques dans la ville.

Le site de l’université de Laval, au Québec, s’exprime ainsi :

« Chose certaine, la langue monégasque serait certainement disparue aujourd’hui si le gouvernement n’avait pas imposé son enseignement dans les écoles primaires et secondaires. Ainsi, contrairement à la France et à l’Italie, seule la petite principauté de Monaco dispense un enseignement* de la langue régionale à ses citoyens. Ses grands voisins semblent encore incapables d’en faire autant. »

                                                                                                                           *Il faut comprendre : un enseignement obligatoire.


Pourtant, on ne peut exagérer la pratique du monégasque, qui est parlé par 17% de la population selon l'université de Laval,* mais qui constitue un marqueur identitaire bien-au-delà de ceux qui le parlent usuellement, comme le montre le succès de l’expression Daghe Mùnegu.

                                                                                                    * Ce chiffre s’applique très probablement aux personnes parlant usuellement le monégasque (notamment dans le cadre familial) et ne comprend probablement pas tous ceux qui, par l’enseignement, ont eu depuis 1976, un apprentissage du monégasque. Le pourcentage des habitants de Monaco ayant une connaissance de la langue, même s’ils ne l’utilisent pas, serait donc supérieur.



Enfin, il existe une autre langue, intermédiaire entre le monégasque appris à l'école et l'occitan alpin maritime*;

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                              * Ou nissart.

cette langue est généralement appelée «patois de la rue», parfois «monéguier» ou encore «muneghié». Cette langue est issue des apports historiques monégasques, occitans, génois et piémontais. Bref, Monaco constitue un îlot linguistique ligurien dans l'aire occitane ( extrait du site de l’Université de Laval, Québec).


 

 


ANNEXES



Quelques précisions (site de l’Université de Laval)


Principauté de Monaco
Capitale: Monaco
Population: 32 965 habitants (2009)
Langue officielle: français
Groupe majoritaire: français (58 %)
Groupes minoritaires: monégasque (17 %), italien (16,6 %), anglais, allemand, espagnol, etc.
La principauté de Monaco comptait 32 965 citoyens en 2009, dont environ 10 000 Français, 7500 Monégasques, 6500 Italiens, 2600 Britanniques, etc.
En fait, plus d’une centaine de nationalités y sont représentées, ainsi que quelque 340 000 comptes en banque, soit dix pour un habitant. La population est composée de beaucoup d'étrangers, généralement riches, qui ont choisi Monaco en raison d’un système fiscal avantageux ; de nombreuses entreprises étrangères se sont installées dans la principauté pour les mêmes raisons.
On compte actuellement près de 25 000 étrangers résidant dans la principauté et parlant des langues très diverses.
Parmi la centaine de nationalités résidant de manière permanente à Monaco, une catégorie bien particulière appelée «enfants du pays» (généralement des «Français de Monaco») est couramment employée pour désigner quelque 14 000 personnes vivant à Monaco depuis plusieurs générations, sans jamais avoir obtenu la nationalité monégasque.
Les langues parlées sont principalement le français (la langue officielle), l’italien et l’anglais.
Environ 75 % des Monégasques parlent le français comme langue maternelle*, 20 % l'italien, 5 % l'anglais. Ces trois langues dominent les communications internes au sein de la principauté.
 Selon l’origine des locuteurs, le français, l’italien et l’anglais servent de langues véhiculaires. Il faut dire qu’une partie de l'économie monégasque repose sur de la main-d’œuvre migrante, provenant surtout de France et d'Italie. Aujourd’hui, Monaco compte plus de 44 000 emplois (publics et privés) pour 32 000 habitants. C'est que, tous les jours, 10 000 «frontaliers», dont les trois quarts sont français, les autres italiens, viennent travailler à Monaco, tout en résidant à l'extérieur de la principauté. Bref, la principauté de Monaco est cosmopolite, tant au plan linguistique qu'ethnique.
Toutefois, il existe d'autres langues, dont deux langues autochtones: le monégasque et le niçois. Seuls quelque 5000 Monégasques parlent encore la langue monégasque, appelée ligure monégasque. Ce sont généralement les «anciens» qui parlent encore cette langue d’origine celto-ligurienne, appelée en monégasque le munegascu. Les jeunes ne la parlent plus, même s'ils l'apprennent à l'école.

                                                                                                                                                                             *  Ce chiffre est visiblement obtenu en ajoutant aux 58% du groupe parlant français, les 17% de locuteurs monégasques, qui sont aussi des locuteurs en français, on s’en doute.



Traité avec la France


Le Traité d'amitié protectrice, signé le 17 juillet 1918, entre la République française et la principauté de Monaco a été remplacé par le traité du 24 octobre 2002. Le nouveau traité fait passer les relations franco-monégasques d’une «amitié protectrice» (traité de 1918) à une situation de parité.

Traité
destiné à adapter et à confirmer
les rapports d'amitié et de coopération
entre la République française et la principauté de Monaco

    La République française et la Principauté de Monaco,
    Désireuses de confirmer par un acte formel de mutuelle confiance les relations étroites et privilégiées qui sont le reflet de leur amitié traditionnelle, telles qu'elles sont issues de l'Histoire et telles qu'elles s'inscrivent dans leur communauté de destin,
    Considérant que ces relations, régies par le Traité du 17 juillet 1918, appellent un cadre juridique mieux adapté aux réalités d'aujourd'hui,
    Se fondant sur les principes du Droit international et de la Charte des Nations unies, et partageant en outre les mêmes valeurs de paix, de démocratie, de justice et de solidarité,
Sont convenues des dispositions suivantes  :
Article premier
    La République française assure à la Principauté de Monaco la défense de son indépendance et de sa souveraineté et garantit l'intégrité du territoire monégasque dans les mêmes conditions que le sien.
    La Principauté de Monaco s'engage à ce que les actions qu'elle conduit dans l'exercice de sa souveraineté s'accordent avec les intérêts fondamentaux de la République française dans les domaines politique, économique, de sécurité et de défense. Une concertation appropriée et régulière y pourvoit en tant que de besoin.
Article 2
    La Principauté de Monaco s'assure par une concertation appropriée et régulière que ses relations internationales sont conduites sur les questions fondamentales en convergence avec celles de la République française.
    La République française se concerte avec la Principauté de Monaco en vue de prendre en compte les intérêts fondamentaux de celle-ci.
Article 3
    En cas de décès ou d'abdication du Prince régnant, Sa succession est assurée en vertu des dispositions pertinentes de la Constitution de la Principauté de Monaco du 17 décembre 1962, modifiée par la loi no 1249 du 2 avril 2002 portant révision de la Constitution.
    Tout fait entraînant une modification dans l'ordre successoral prévu par la Constitution est porté à la connaissance de la République française.
    Le territoire de la Principauté de Monaco est inaliénable.
Article 4
    La République française peut, à la demande ou avec l'agrément du Prince, faire pénétrer et séjourner sur le territoire de la Principauté de Monaco les forces nécessaires à la sécurité des deux Etats.
    Toutefois, cette demande, ou cet agrément, n'est pas requis lorsque l'indépendance, la souveraineté ou l'intégrité du territoire de la Principauté de Monaco sont menacées d'une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics est interrompu.
Article 5
    Les relations entre la République française et la Principauté de Monaco s'établissent au niveau diplomatique. Chaque Etat entretient, à cet effet, une représentation sur le territoire de l'autre.
    La République française facilite, à la demande de la Principauté de Monaco, l'adhésion de celle-ci aux organisations et institutions internationales auxquelles elle participe.
    Dans les Etats où la Principauté de Monaco ne dispose pas d'une représentation consulaire, et sous réserve des dispositions du droit international régissant les relations diplomatiques et consulaires, les ressortissants monégasques peuvent s'adresser en tant que de besoin à un poste diplomatique ou consulaire de la République française ou la représentant.
Article 6
    La République française et la Principauté de Monaco concluent des conventions particulières dans les domaines d'intérêt commun.
    Les conventions en vigueur à la date du présent traité le demeurent.
Article 7
    La République française et la Principauté de Monaco s'engagent à procéder à des consultations régulières sur les situations d'intérêt commun.
    La Commission de coopération franco-monégasque sert de cadre à ces consultations, ainsi que les commissions instituées par les conventions ad hoc.
 
Article 8
    La République française et la Principauté de Monaco notifient l'une à l'autre l'accomplissement des procédures constitutionnelles requises pour l'entrée en vigueur du présent traité, laquelle intervient le premier jour du mois suivant la date de réception de la seconde de ces notifications.
    Le présent traité peut être modifié par le commun accord des parties. Les modifications prennent effet selon les mêmes procédures que celles mentionnées à l'alinéa précédent.
    Fait à Paris, le 24 octobre 2002, en double exemplaire.
Pour la République française :
Dominique  de Villepin,

Ministre des affaires étrangères
Pour Son Altesse Sérénissime le Prince de Monaco :
Patrick Leclercq,
Ministre d'Etat


 

 

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Commentaires
Le comte Lanza vous salue bien
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